DREAM OF CALIFORNICATION

7 Octobre 2007.

« OH MERDE ! »
« Qu'est-ce que t'as ? »
« Vass, tu ferais bien de t'asseoir. »
« Ranja à quoi tu joues encore ? »
« T'es assis ? »
« Oui. »
« T'es sûr ? »
« Oui Ranja je suis sûr d'être assis maintenant dis-moi ce qui te met dans un tel état ! »
« Je suis enceinte ! »
« QUOI ? »
« Je suis enceinte ! »
« Mais... mais comment t'as pu ? Dis-moi que tu n'as pas arrêté de prendre la pilule comme une conne ! »
« Je pensais que tu avais dit qu'un jour tu voudrais des enfants ! »
« Pas comme ça ! Pas à notre âge ! »
« Je trouve ça génial moi d'avoir des gosses quand on est jeune ! »
« Ranja... t'as 18 ans, j'en ai 19, on vit sur les comptes de nos parents. Avec un enfant tu vas devoir grandir, trouver un job, arrêter de faire la fête. T'es complètement irresponsable. »
« Je veux le garder. »
« Moi aussi je veux le garder, mais je préfère que tu comprennes bien ce que ça implique. »
« Je t'aime bébé. »
« Si tu m'aimais vraiment tu m'aurais pas fait ce coup-là. Je sors boire un verre, parce que moi je peux encore, toi tu t'es engagée pour neuf mois de sobriété. »

Il claqua la porte, au bord de la crise de nerfs. Ils n'étaient ensemble que depuis six mois, elle était complètement débile, jamais ils ne seraient prêts à être parents dans neuf mois. Surtout pas elle, une gamine inconsciente, qui pensait qu'avoir Papa et Maman derrière soi était une preuve de leur amour indéfectible. Quelle preuve pourraient-ils donner à leur enfant s'ils étaient tous les deux au chômage, tous les deux étudiants ? Vassili s'en voulait d'avoir aussi facilement cédé, c'était avec la vie d'un enfant qu'il jouait après tout. Mais aucun doute ne lui traversait l'esprit, il était fait pour être père et puis... Dieu seul savait quand se reproduirait une opportunité pareille d'avoir un enfant à lui. Depuis qu'il avait embrassé ce garçon un an plus tôt il avait du mal à s'imaginer passer sa vie avec la même fille. Ranja était géniale mais ils n'étaient pas faits pour être ensemble tout au long de la route. Ce bébé, cet être en devenir, n'était qu'un signe du destin à ses yeux. « Prend tout ce que tu peux prendre et casse-toi avec. » Le message était clair et il l'aurait pris au sérieux si ce n'était pas elle qui s'était barrée la première.

29/30/31 juin 2008.

Ses longs doigts caressaient l'intérieur de la main du nourrisson, voilà deux heures qu'il était né, son fils, son bébé. Tristan Khariton Mauritz. Il était si beau, si innocent, si sage que Vassili commençait vraiment à croire que cette aventure serait facile pour eux trois, que finalement ils arriveraient à s'en sortir sans soucis. Il embrassa son enfant, la chair de sa chair, et retourna vers le lit dans lequel Ranja s'énervait contre la télécommande.
« Je ne veux pas allaiter. »
« D'accord, calme-toi. »
« Je veux sortir d'ici, je veux aller faire la fête ! »
« Ranja tu viens d'accoucher ça te dirait pas de commencer à tisser des liens avec ton fils ? »
« J'en tisse depuis neuf mois des liens, j'ai envie de boire un verre et de fumer une cigarette maintenant. »
« Tu pourras sortir demain, t'iras te défoncer si tu veux, moi je serai chez nous avec Tristan. »
« Oh lâche-moi un peu Vassili, t'es pas le père modèle parce que ton gosse a trois heures et que tu ne peux plus t'en passer. Tu ferais bien de bosser tes cours plutôt que de baver sur lui, comme ça au moins tu nous serviras à quelque chose parce que pour l'instant, t'es le seul dont on peut se passer dans cette famille. »
« Ta gueule. Ferme-la ! Tu m'entends ? T'es dans cette situation parce que tu as cru que tu pourrais t'occuper d'un gosse, mais tu peux même pas t'occuper de toi-même alors je te conseille d'arrêter de monter sur tes grands chevaux avec moi et de trouver une chaîne sur cette foutue télé. »

Le lendemain à la sortir d'hôpital, Vassili ramena Tristan chez lui. Il avait décidé de laisser le taudis dans lequel ils vivaient à Ranja pour qu'elle fasse la fête. Installant son fils dans son lit deux places, entre deux coussins, il commença à jouer avec lui, le grattant doucement derrière le genou, lui embrassant le coup, frottant son nez contre sa nuque. Ce petit bonhomme était son univers maintenant. Vassili comprenait pourquoi sa mère disait qu'à sa naissance tout son monde avait changé. Depuis hier, il n'était plus le même jeune homme de vingt ans. Il entrevoyait la route, il devait penser pour deux, travailler pour deux, être prévoyant pour que Tristan vive une belle vie.

« Tu veux que Papa te lise un livre ? »

Sans attendre de réponse il sortit un roman qu'il étudiait à la Haute Ecole de Genève et entama la lecture à son fils, qui fasciné par son père et sa voix, le regardait éberlué.
Au petit matin, son téléphone était toujours vide de message. Vassili, d'un caractère inquiet, appela sa petite-amie dans l'espoir d'obtenir des nouvelles.

« Allo ? »
« Ranja ? »
« Quoi ? »
« Je voulais juste vérifier que tu allais bien. »
« Tout est cool. »
« Tant mi... attends qui parle à côté de toi ? »
« Oh ça ? C'est un de nos potes grecs. »
« Grecs ? »
« Je t'ai pas dit avec les copines on a décidé de partir faire le tour du monde. »
« Tu te moques de moi ? »
« Cela t'ennuierait pas de garder Tristan pendant que je fais la globe-trotteuse ? »
« Ranja tu te fous de ma gueule c'est ça ? Ton enfant n'a que deux jours et tu m'annonces que tu veux quoi ? Faire le tour du monde ? »
« En fait on a déjà commencé, mais ne t'inquiètes pas je serais de retour dans un mois ou deux. »
« Je te rappelle qu'on devait partir la semaine prochaine pour San Diego. »
« Je te rejoindrai là-bas. A plus mon cœur. »
« ... »

Il venait de se faire larguer. Il n'avait aucun doute là dessus, jamais elle ne se pointerait dans un mois ou deux elle venait de les abandonner tous les deux. Aussi surprenant que cela puisse paraître la seule pensée qui lui traversa l'esprit à cet instant fut : « comment vais-je l'empêcher de me le reprendre si elle se pointe un jour ? ». Une minute plus tard il était en conversation intense avec son père pour trouver un avocat afin de désaisir Ranja de son autorité parentale.

28 août 2008.

« Voilà notre nouvelle maison mon bébé. Je sais c'est pas très grand mais c'était soit un tout petit appartement juste pour papa et toi, soit une chambre avec plein d'autres garçons de l'âge de papa. Et tu n'aurais pas voulu ça hein ? Que papa passe plus de temps à regarder ses camarades de classe qu'à s'occuper de toi ? »

Depuis qu'il était arrivé à San Diego et qu'il avait fini de remplir son inscription pour sa première année universitaire en double cursus, Vassili avait arpenté la ville, bébé sur le ventre pour trouver un logement à son petit garnement. Finalement après une semaine intensive de recherche et un appel désespéré à son père, le jeune parent-célibataire avait obtenu un appartement de trente-cinq mètres carrés, avec une chambre séparée pour que Tristan puisse dormir pendant qu'il travaillerait.

« T'en dis quoi mon bébé ? Tu aimes bien notre nouvelle maison ? »

Tristan ne pouvait pas répondre, il le savait bien mais que voulez-vous ? L'apprentissage de la langue passait avant tout par l'écoute, aussi, s'il voulait qu'un jour Tristan soit polyglotte il fallait qu'il commence dès maintenant à lui parler en anglais, en français, en allemand et en italien. Les quatre langues qu'il maîtrisait parfaitement, en grande partie parce que la Suisse était une région trilingue. Et puis... Vassili devait avouer que de ne pas parler avec son enfant l'aurait contraint à ne pas parler beaucoup. Maintenant qu'il était inscrit il fallait qu'il trouve un petit boulot et une crèche pour assurer leur survie, indépendamment des virements que ses parents ainsi que ceux de Ranja -qui voulaient s'impliquer dans l'éducation de leur petit fils un minimum- lui feraient pour qu'ils aient de quoi vivre.

« Qui va venir se poser contre papa ? C'est mon Tristan ! Pas longtemps, cinq minutes, le monde sera toujours juste là dehors prêt à nous manger tout cru, après un câlin. »

31 décembre 2012.

« Qu'est ce que tu as fait de ton môme Mauritz ? »
« Je l'ai laissé à sa nounou, elle m'a proposé de me libérer ma soirée contre deux dollars de l'heure en plus... »
« Bon, tu bois quoi ? »
« N'importe quoi, un truc fort j'ai besoin de me mettre minable ce soir ! »
« LES GARS VASSILI VA FINIR CUIT ! »

Il n'avait pas fait la fête comme ça depuis des mois, en fait il n'avait jamais vraiment fait la fête comme ça. Dans un bar gay, avec des potes homos... ce n'était pas vraiment son style. Ou du moins il se disait que ce ne l'était pas. Parce qu'il était père de famille, qu'il devait prendre ses responsabilités, penser à son fils en permanence. Mais ce soir, il allait juste profiter, pouvoir danser, se déchaîner sans avoir peur que Tristan ne se mette à pleurer.

« Comment tu fais Vassili ? »
« Pour ? »
« Savoir que tu plais à un mec. »
« Je n'en sais rien. »
« Arrête. »
« Ce n'est que ma deuxième sortie en boîte gay, t'es un expert par rapport à moi ! »
« Allez j'en ai repéré un. »
« Tape-toi le ! »
« J'y compte bien. »

C'était facile pour lui, d'aider un de ses amis à s'affirmer. Alors que lui, il était coincé au bar à remuer son corps sobrement tout en buvant. Il ne savait pas qui il voulait. Il ne savait pas ce qu'il voulait. Il ne pouvait pas avoir ce qu'il aurait voulu et ne voulait pas ce qu'il aurait pu avoir.

« Bonsoir. »
« Salut. »
« Je t'offre un verre ? »
« Avec grand plaisir. »

Il finirait la soirée avec ce mec, chez ce mec, partant au petit matin pour libérer la baby-sitter et retrouver son fils avant qu'il ne se réveille et ne commence à poser des questions. Sa vie était tellement compliquée par moment que Vassili se demandait si ce ne serait pas plus simple de balancer l'information de sa bisexualité dès maintenant à Tristan, il avait trois ans, il intégrerait ça comme la normalité de son père. Pourquoi ne pouvait-il pas s'y résoudre ? Peut-être qu'il n'était pas prêt à se l'avouer à lui même...

17 & 18 juin 2013

« Bravo pour votre diplôme monsieur Mauritz. »
« Merci beaucoup professeur, c'était vraiment un cursus passionnant, j'attends encore quelques jours pour me décider si je continue pour un doctorat en littérature ou en histoire de l'art. »
« Je ne savais pas que vous envisagiez de continuer une autre voie ! Tant que vous continuez vos études et que vous vous y consacrez, vous parviendrez à tout Vassili. »
« Papa on rentre ? »
« Viens par-là bonhomme, dis bonjour au professeur de papa. »
« Bonjour. »
« Comment s'appelle-t-il ? »
« Tristan. »
« Où est sa mère ? »
« Elle n'a jamais tenu à s'investir dans son éducation, c'est juste nous deux contre le reste du monde, pas vrai Tristan ? »
« Juste papa et moi, pas maman. Elle ne veut pas s'investir. »
« Passez me voir demain, j'ai peut-être une proposition à vous faire. »
« Oh, très bien, au revoir professeur. »
« Au revoir Tristan, Vassili. »

Arrivé à l'appartement, qui était devenu bien trop petit pour eux deux avec le temps, Vassili collectionnant les livres avec autant de frénésie que Tristan multipliait ses jouets. A quatre ans le petit garçon était très intelligent, d'une gentillesse rare et d'une douceur sans commune mesure avec son père. Ils s'entendaient bien, tous les deux ils formaient une petite famille originale mais parfaite à sa façon. Vassili se sentait seul mais qu'y pouvait-il ? Alors que Tristan réclamait un verre d'eau, Vassili lui montra un jus de pomme gazéfié.

« Grâce à ton petit numéro papa a sûrement trouvé un job mon cœur ! Tu veux un peu de jus de pomme qui pique ? »
« Oui ! »
« Qu'est ce qu'on dit ? »
« Merci, Grazie, Thank you, Danke ! »
« J'aime mieux ça. »

Le lendemain son professeur lui proposa bel et bien le job d'assistant. Un salaire fixe et vraiment attrayant pour donner des cours à des élèves allant de la première année à la troisième année de licence alors qu'il entamerait son doctorat. C'était tout ce qu'il lui fallait pour recommencer à zéro, changer d'appartement.

« On le prend. Il est parfait. »
« Je vous laisse les papiers là Monsieur Mauritz. »

Soixante-dix mètres carrés, deux chambres, une grande salle de bain, un wc indépendant, un grand salon, une jolie cuisine, une pièce qui serait leur salle de jeux, une terrasse... C'était parfait, loin du bruit insupportable de la Jolla, ils avaient déménagé dans le quartier de Downtown. Peut-être de façon trop précipitée, mais Vassili avait flashé sur l'appartement et ne le laisserait pas passer. Depuis qu'ils étaient arrivés, il avait économisé pour pouvoir leur offrir un meilleur train de vie et ce nouveau job y participait largement, en plus du chèque de félicitations à quatre zéros de ses parents.

HORS JEU
Pseudo Lunou Âge J'ai 21 ans... malgré une hésitation... Prénom Quentin. Où as-tu connu le forum? C'mon G', alias Cameron Rayner qui m'a montré le chemin :D Ton personnage est un personage inventé. C'est qui ton pokémon préféré? Alakazam sans hésitation Une suggestion ou un commentaire à nous communiquer ? J'ai rien à vous suggérer vous gérez ça très bien sans mon aide. Le mot de la fin? C'est tellement lumineux que j'dois mettre ma luminosité au minimum (jesors).