Le rythme des journées était soutenu et je commençai a le sentir sur mes frêles épaules. Me lever le matin a six heures pour aller promener les chiens de ces sales cons bourrés d'argent, aller en cours, faire mes cours et surtout m'occuper du chien de Bonnie... Insoutenable. Je tenais fermement Oskar le chien chinois diabolique en laisse tandis que Patrouille marchait a mes côtés dociles. Mon pitbull était parfaitement dressé et il suffisait que je claque des doigts pour qu'il ne mange la sale bête de la blondasse. Mais non.

Je venais d'achever sa promenade avant de me diriger vers l'imposante villa de ma mère. Qui aurait cru que ma propre génitrice me relèguerait au rang de domestique ? On se croirait dans un mauvais conte de fées où le prince charmant viendrait me tirer de mes haillons. Sauf que ledit prince se tape un peu ma belle-sœur. Bonnie et Clyde. Normalement un beau duo platonique mais cette gourde n'a jamais saisie l'ampleur de leur relation pendant que Bonnie était juste hype. Et ta connerie elle est hype ?

J'entrais par la baie vitrée avant que l'affreux rat sans poils ne dévoile ma présence et que le diable ne vienne nous interrompre. "Chouuuuuu tu es rentré!" Elle se jeta sur son machin sans se soucier de si mon bras était encore accrochée a son affreux rejeton. "Alors la fleur fanée, t'as bien pensé a aller le faire toiletter ?" Ce sont tes bonnes manières qu'on devrait toiletter et de plus ton chien a autant de poils que ton cerveau n'a de matière. "Pas trop deg pour Clyde et moi ? Bonnie and Clyde..." Elle eut un de ses rires qui faisait que j'aurai pu la tuer. "Nous sommes trop beaux." J'eus un sourire forcé, poli, avant de rétorquer. "En espérant que vous ne finissiez pas pareils." Elle plissa les yeux signe qu'elle essayait d'allumer sa matière grise. "Mort. Criblés de balle quoique toi ça m'étonnerait..." Mon dieu quand elle me demanda pourquoi je me retins de la gifler. "Les truies on les égorge." C'est qu'elle se jetât sur moi mais Patrouille fit obstacle en montrant les crocs. "CLYYYDE on m'attaaaaaque." Oh non! Il est la.

Je n'eus même pas le temps de lancer mon chien qu'elle partit en courant et que je devins muette comme une carpe. Timidité quand tu nous tiens!

Les seuls moments où je supportais que l'on crie mon prénom, c'était sous les draps d'un lit, alors autant dire que l'appel à l'aide de Bonnie me décrocha plus un soupir et un roulement des yeux qu'autre chose. J'ai déjà eu envie de lui couper la langue à plusieurs reprises, mais ce genre de choses ne se faisaient pas et il ne tenait qu'à moi de la quitter. J'aurais pu le faire depuis un moment, en fait... c'était pas difficile de se trouver quelqu'un de mieux qu'elle, mais étant donné que sa famille vivait près de chez moi, c'était plus pratique quand j'avais envie de relations sexuelles. Oh, naturellement que j'allais voir ailleurs quand j'en avais l'occasion mais je ne culpabilisais pas trop, parce que je savais que mademoiselle faisait sans doute de même. J'étais son trophée, elle était mon trou, c'était un équilibre que je pouvais accepter pour le moment, bien que cette situation finirait par me lasser comme tout ce qui m'entourait au niveau social. Dans le milieu de la mode, les conversations étaient d'une superficialité tellement exacerbée que je n'arrivais pas à comprendre comment cela pouvait exister. Je veux dire... qu'est-ce qu'on s'en fiche que tu portes une chemise ou un t-shirt ? Du moment que tu n'es pas à poil, tout va bien, non ? Je saisissais pas le principe qu'on puisse se moquer de quelqu'un parce qu'il ou elle était mal habillé. C'était juste méchant, mais j'imagine que ça donnait un sujet de conversation.

« Qu'est-ce qu'il y a ? » Comme si je n'avais pas entendu ce qui se passait à des kilomètres à la ronde. La jeune femme fondit littéralement dans mes bras et j'en passais un derrière ses épaules par réflexe, alors que le molosse de sa petite soeur apparu dans mon champ de vision. « C'est encore cette pimbêche et son horrible chose qui ne ressemble même pas à un chien, j'en ai marre... » Je lançais un coup d'oeil à l'animal qui resta fermement aux aguets pendant quelques secondes, puis retourna ensuite dans la pièce d'à côté, avant de relâcher ma ma petite-amie. « C'est bon il est parti. Tu m'attends en haut ? » Je lui offris un sourire, puis l'embrassais brièvement, ce qui suffit à la convaincre de laisser tomber son drame pour aller, je l'espère, retirer ses vêtements en trop.

Une fois que Bonnie fut hors champ, je m'approchais de l'endroit où se trouvait sa demi-soeur et m'arrêtais à l'embrasure de la porte. À nouveau, mon visage se peignit d'un petit sourire se convenance. « Salut Lilas, tu vas bien ? » C'était plutôt rare de l'entendre, elle qui se faisait toujours si discrète. « J'espère que je vais pas mourir fusillé dans ma voiture, pour ma part, hahaha. »

Lorsque j’entendis Bonnie qualifier mon chien de monstre, tous mes muscles se tendirent et je me voyais déjà la vider de son sang. Cette sale pétasse ! Il est rare que j’insulte quelqu’un généralement mais elle… J’avais la haine contre cette fille. J’aurai pu l’appeler démon mais elle était pire que démoniaque. Je la soupçonnai de se servir de Clyde pour me faire du mal mais bon, s’il était assez stupide pour rester avec elle. Rien de penser à eux en train de s’adonner à des pratiques sexuelles, j’en avais la nausée. Il est à moi, bordel. Je l’avais vu en première. Je m’en souviens, j’étais venue voir ma mère alors qu’elle venait d’emménager et je l’avais croisé. Solitaire et incroyablement beau. Ce n’est pas le genre de mec qui s’intéresserait à moi. Si bien que quand il s’est mis avec ma demi-sœur, je n’y ai pas vu une exception. Il semble être le genre de mec qui aime les poupées superficielles. Oh mon dieu, moi je ne peux pas. Il faudrait me payer.

Lorsque Patrouille revint dans la cuisine au petit trot, je me baissais pour le caresser. « Non, tu n’es pas un monstre, mon bébé. Elle ne sait juste pas voir ce qui est beau… Mais bon Dieu n’accorde pas tout à tout le monde, on peut avoir un cerveau et la beauté… Quoique beauté, si on entend passer sur le billard, chuchotai-je à mon chien. » Ce dernier se mit à baver. On va dire que c’est bon. Mon chien est la seule personne qui me comprenne dans ce bas monde. Je lui grattouillai derrière l’oreille. Et je ne suis pas une pimbêche, je n’ai jamais pris les gens de haut. Je me levai en passant une main dans mes cheveux pour resserrer l’élastique de mon chignon lâche. Puis, je soupirai. Je me relevai quand j’entendis la voix de Jaime – ou Clyde comme je préférai l’appeler- et je me mis debout comme si on m’avait piqué.

Il connait mon nom. OMG. J’écarquillai les yeux avant de lui sourire d’une manière gêné avant d’essayer de répondre. « Bah… euh… » Je sentis le rouge me monter aux joues. Il était si beau dans l’embrasure de la porte et Patrouille s’assit doucement avant de le regarder d’un air suspicieux. « Vous… vous… enfin… vous… » Argh, je me ridicule totalement là. Reprends-toi Lilas. « Il… C’est pas un monstre. Il est très gentil, dis-je à toute vitesse. » Je le caressai derrière son oreille et il me bava sur les mains. Je fis la grimace. « Mais il bave. » Je trépignai sur place. On aurait dit que je faisais des petits sauts. « Ca… J’suis pas une pimbêche. » Je baissais les yeux comme une enfant avant d’avoir un œil mauvais qui dura un quart de seconde. Je la tuerai un jour. « Je me porte bien, sinon. » Je me dirigeai vers le frigo avant de l’ouvrir pour me servir à boire. « Vous voulez quelque chose ? Demandai-je timidement. » C’est vrai que j’suis en short de sport et en sweat devant lui. J’ai super la classe comparée à Barbie qui ne porte que du Chanel. Comment il faisait pour la supporter. « Oh vous savez, vous êtes déjà quasi mort à trainer avec le diable en personne. » J’avais presque oublié un instant le rôle que je jouais. « Si seulement elle pouvait mourir étouffée par son silicone, murmurai-je dans ma barbe. » Je sortis un verre en laissant le frigo entrebâillé. Je lui fis un sourire timide avant d’en prendre un autre même s’il ne m’avait pas répondu. Je restai plantée devant le frigo en attendant qu’il me réponde tandis que mon chien s’approcha de lui pour lui mettre des coups de tête dans la main. « Il veut que vous le caressiez. Je l’ai dit, ce n’est pas un monstre. Il la prend juste pour… » Le rouge me monta de nouveau aux joues. « Pour un jouet qui couine. »

Je ne savais pas tellement quoi penser dans l'immédiat, mais la timidité de cette fille coupait la moité de ses phrases en deux et par rapport à la voix de sa soeur, c'était plutôt reposant. Je ne l'entendais presque jamais parler, Lilas, et il semblait évident qu'on ne lui en donnait pas tellement l'occasion dans cette maison. À sa place, j'aurais déjà déguerpis depuis un moment. « Oh, j'en doute pas. » Mais les animaux et moi n'étions pas trop amis en général... je ne sais pas trop pourquoi, d'ailleurs. La remarque sur la bave m'arracha un semblant de rire et je décroisais les bras, avant de hausser un sourcil à une remarque qui n'avait rien à voir dans la conversation. « Ca… J’suis pas une pimbêche. » Huh ? Non... en effet... mais... ? Peut-être qu'elle se parlait à elle-même ou alors qu'elle voulait me convaincre d'un truc qui me semblait déjà évident. « T'y ressembles pas, en tout cas. » Je fis quelques pas en avant pour m'approcher un peu, en restant tout de même méfiant vis-à-vis du chien, puis jetais un coup d'oeil dans le frigidaire lorsque la jeune femme me proposa une boisson. Au moment où je m'apprêtais à répondre à sa question, je l'entendis cependant ajouter des commentaires assez méchants concernant Bonnie et me braquais aussitôt. À vrai dire, j'étais d'accord avec ce qu'elle me disait, mais je ne pouvais décemment pas cracher sur ma petite-amie, c'est pour ça que j'ai préféré ne rien ajouter dans un premier temps, si ce n'est un toussotement plus ou moins explicite concernant le fait que je, copain de sa demi-soeur, était encore dans la pièce. « Je peux avoir le jus d'orange, s'il te plaît ? »

Sans plus de cérémonies, j'allais prendre une chaise pour m'y asseoir et observais la demoiselle d'un air pensif. Il y avait un truc qui clochait chez elle, mais je n'étais pas encore sûr et certain de ce dont il s'agissait. Dans tous les cas, ce n'était pas à moi de m'en mêler.

Lorsque la grosse boule de poil arriva à ma hauteur, je ne pus m'empêcher de retenir ma respiration un instant, puis lui passais doucement la main sur la tête, même si l'animal ne bougea pas tellement. « Ouais... » Lorsque la remarque du jouet qui couine arriva, je me retins de rire à nouveau. Décidément, cette fille me plaisait bien. J'avais plus envie de rester là que de monter à l'étage, pour vous dire. « Oh, il a pas tort. » Je comprends mieux pourquoi on s'entendait bien. « C'est à peu près ça que ça se résume ». C'est vrai, Bonnie était un chouette sextoy et en contrepartie, ça faisait peut-être de moi un chouette connard opportuniste. Je n'étais pas tellement à l'aise avec cette image de ma personne. « Le chien de ma mère m'a attaqué quand j'avais onze ans, alors j'ai plus tellement confiance dans ces bestioles depuis l'incident. » Je levais une manche de mon pull pour montrer la cicatrice qui remontait sur mon avant-bras, puis tentais une nouvelle caresse méfiante. C'est à peu près à ce moment-là qu'une voix sonore se fit entendre en haut, m'invitant à me lever de mon siège, ce que je fis dans un petit soupir peu enthousiaste. « Tu penses que je mérite aussi de finir étouffé par sa poitrine ? Tu peux me tutoyer, tu sais. » Mes yeux se tournèrent dans la direction de mon interlocutrice avec une franchise totale. Vu ce que je l'avais entendue dire jusqu'à présent, autant avoir la version complète de son avis.

Je ne savais pas trop comment réagir en sa présence. Il était le petit-ami de ma demi-sœur et également l’homme qui me plaisait. J’aurai pu lancer un appel à l’aide pour Patrouille mais ce dernier ne m’aurait été d’aucune utilité. « Non mais c’est vrai. Il est super gentil. On dit que les chiens ressemblent à leurs maitres. Et il me ressemble. A moins que vous pensiez que je sois méchante ? » Je lui fis à nouveau un petit sourire discret. Je n’aimais pas trop m’épancher ou même parler. C’est pour ça que je fuyais les gens, que je ne voulais pas voir des gens parce que je savais qu’ils ne me comprendraient pas. Etant malade, je n’aimais pas être près de mes pairs. « Merci. » Je me dirigeai alors vers le frigo pour l’écouter me répondre et sortir le jus d’orange tandis que je pris de la Redbull. Comme si je n’étais pas assez énervée comme ça. Mon beau-père ou la seule personne qui m’appréciait dans cette maison avec la femme de ménage. Même Oskar ne m’aimait pas.

Patrouille se dirigea alors vers lui pour demander une caresse. C’est là que je vis Jamie se tendre comme s’il redoutait les chiens. Je lui servis son verre avant de le lancer vers lui à la manière d’une barmaid – j’avais vaguement exercé cette profession au noir – avant de décapsuler ma cannette pour en verser le contenu dans mon verre et prendre place juste en face de lui sur le plan de travail. J’aurai pu aller sur une chaise mais je me ravisai au dernier moment pour porter mon verre à mes lèvres dans un petit sourire. « Ce n’est pas parce qu’un chien t’a mordu une fois que les autres sont tous pareils. Nous sommes tous différents et eux aussi. Regarde-moi, est-ce que je ressemble à morceau de plastique ? » Je me rendis compte alors que je disais du mal de sa petite-amie et je baissais la tête. « Désolée, je ne voulais pas être méchante. » Lorsqu’il me montra sa cicatrice, je m’approchai timidement sur la pointe des pieds comme une danseuse avant de regarder son bras. « Les hommes sont tous des bébés. »

Lorsque la voix de Barbie résonna dans la maison, je fermais les yeux avant de soupirer pour aller chercher mon verre. « Tu l’as choisie. » Je le taquinai au fond avec un petit sourire malicieux. « Personne ne mériterait une fin aussi horrible. » Je reposai mon verre dans l’évier avant de le laver pour aller le ranger. « Tu sais, Patrouille c’est mon garde du corps, je l’ai acheté après… » Je déglutis n’osant le dire tandis que mes yeux se perdirent dans le vague. La scène du bal se rejoua sous mes yeux et je resserrai mon emprise autour de l’évier avant de secouer la tête. « Qu’un évènement fâcheux se soit produit. »

J’allais partir lorsque Bonnie déboula… à poil. « MAIS QU’EST-CE QUE TU FOUS JAMINOUNET ? JE T’ATTENDS DEPUIS DES HEURES ? » Oh faut pas charrier, trois minutes. Peut-être dix au maximum. Je soupirai tandis qu’elle se mit à remarquer ma présence. « TOI. T’ESSAYE DE ME PIQUER MON MEC ? » Mais elle est folle. Elle s’approcha de moi et Patrouille se mit en travers de sa route mais elle lui flanqua une de ces raclées que le chien craintif alla se tapir dans un coin. « Tu parles d’un… » Je n’eus pas le temps de finir ma phrase qu’elle me gifla avant de m’empoigner la gorge. Meuf, t’es à poil et tu me frappes. Jalousie quand tu nous tiens. Elle me plaqua contre la baie vitrée et je manquai de suffoquer. Je me débattis tandis qu’elle continuait de m’insulter avant d’attraper sa tête pour l’exploser sur une chaise. Elle tomba au sol et je pris la nappe pour la couvrir avant de me masser le cou pour me tourner vers Jamie. « Jaminounet ? Sérieux ? » J’éclatai de rire avant de tousser. « Pauvre tarée. » Et après, elle me disait folle. « Je pense que tu devrais l’emmener à l’étage, le temps qu’elle se réveille. » Oskar ne tarda pas à se ramener en glapissant mais Patrouille qui venait de retrouver ses esprits lui sauta dessus. « PATROUILLE. STOP. » Puis, je m’assis sur la chaise cassée avant de me prendre la tête entre les mains. « Je pense qu’on va éviter de s’adresser la parole hein ? Et je suis désolée d’avoir dit du mal sur elle ainsi que de ça… » Je lui montrai Bonnie d’un geste de la main. C’est une honte pour le genre féminin cette fille.