Clyde était seul. Affalé dans son canapé, la télé en bruit de fond pour se sentir un peu moins esseulé. C'était comme ça depuis qu'Alma était partie. Derrière elle, elle n'avait laissé que le vide. Le vide dans l'appartement qu'ils partageaient, le vide dans le coeur de Clyde. Il avait essayé de se changer les idées... Il s'était remis à fumer. Un peu. Juste ce qu'il faut pour planer. Pas pour oublier. Clyde aurait bien aimé pourtant mais il en était incapable. C'est le même disque depuis des jours. Elle est partie. Pas un signe de vie depuis, pas un sms. Clyde sortait de temps à autre, la cherchait partout du regard. Elle était jamais là non plus. Disparue. Alors, la plupart du temps, il reste là. Dans son canapé. La télé allumée qu'il ne regarde pas, le regard ailleurs. Son portable sonne, il met un moment avant de réagir. Clyde sursaute, attrape son téléphone et répond. Ici l'hôpital. Clyde déglutit, il n'a encore aucune idée de ce qu'il se passe mais l'appréhension est déjà là. Alma. Ça se bouscule dans sa tête, il est arrivé quelque chose à Alma et forcément au bébé. Clyde imagine le pire, raccroche précipitamment en jurant qu'il serait là dans les plus brefs délais. Il fonce sur sa moto, démarre. Les quelques minutes de trajet lui paraissent interminables. Il peut pas s'empêcher de penser à autre chose qu'à ce fils qu'il a tellement envie de voir naitre. A Alma aussi. C'est ni rose, ni beau entre eux en ce moment. Et pourtant. Clyde se gare à l'arrache, descend de sa mot et se précipite dans l'hôpital. A l'accueil, il presse la bonne femme qui s'en occupe et finit par avoir le numéro de la chambre d'Alma. Il court, se perd, peste. Putain. Il doit savoir. C'est urgent, la peur le rend dingue. Finalement, il y arrive. Il toque même pas, il entre en trombe. Pas question qu'on vienne l'emmerder, c'est de sa famille dont il s'agit. Alma est là cette fois. Clyde semble un peu se calmer, il reprend son souffle. Il referme la porte, évite de trop regarder Alma. Il avait eu envie de la voir mais, en fait, ça fait mal. « Qu'est-ce qu'il s'est passé? Il va bien au moins? » Il. Leur bébé. Evidemment. Ce petit garçon que Clyde a tellement hâte de voir, ce bébé même pas encore né pour qui Clyde donnerait sa vie. Rien que ça.

La journée avait pourtant bien commencé. Du moins, elle avait commencé correctement. Depuis qu'elle a décidé de quitter l'appartement de Clyde, Alma a trouvé refuge chez Swen, sa meilleure amie. Ses journée se résument à cela : elle se lève, se pose sur le canapé, le regard dans le vide, et puis parfois, elle pleure. De temps en temps, elle se traîne jusqu'au lycée afin d'essayer de ne pas se détourner du programme scolaire. Et puis, elle rentre, et pleure sur l'épaule de Swen. Ouais, elle passe son temps à ça. A pleurer. A repenser à ce qui s'est passé ce jour-là. A ce que Clyde a pu dire. Il est deux heures de l'après-midi quand Alma se décide à se lever du canapé-lit. La maison est silencieuse, Swen est déjà parti. D'un pas lourd, elle se rend dans la cuisine afin de manger un peu. Elle passe sa main sur son ventre. Bébé a tendance à bouger ces derniers-temps. Peut-être sent-il l'absence de son papa. Ses yeux virevoltent sur le plan de travail. Pas l'ombre d'un bol. Elle lâche un soupir. Swen ne peut-elle pas être comme tout le monde et laisser le bordel chez elle ? Elle ouvre le meuble, se hisse sur la pointe des pieds pour en attraper un. Sans succès. Elle traîne une chaise à ses pieds, monte dessus. Et là, trou noir. Elle ne se souvient de rien. Seulement du bruit du monitoring de l'hôpital et de l'air compatissant de l'infirmière. Qu'est-ce qu'elle fait là ? Ses yeux s'écarquillent. Elle se relève derechef, épie la salle. « restez tranquille. » entend-elle, alors que ses yeux se pose sur la-dite infirmière. Sa tête lui fait affreusement mal, son oeil aussi. Elle regarde son reflet dans la vitre, son oeil est teinté de bleu. Elle le touche du bout des doigts, grimace. « que s'est-il passé ? » demande-t-elle, tirant sur sa blouse. L'infirmière repose son bloc, la regarde un instant. « vous avez fait un malaise. reposez-vous, vous êtes trop faible pour sortir aujourd'hui. » conseille-t-elle. Son coeur rate un battement, ses yeux se plaque directement sur son ventre. Elle le caresse. « ne vous en faites pas, il va bien. un vrai petit gaillard ce petit ! d'ailleurs, un membre de votre famille ne devrait pas tarder à arriver. » finit-elle par dire. Un silence s'installe. Puis un rire. Elle n'a pas de famille. Elle n'en a plus. Elle est seule. Avec son fils. Il va falloir s'y faire. L'infirmière sort de la pièce, elle se retrouve seule. Le calme. Pourtant, sa tête tinte, horriblement. Mais cela ne dure pas longtemps. La porte s'ouvre de nouveau, brutalement. Clyde... son nom sort dans un souffle inaudible. Son regard se balade sur lui, des papillons volent au creux de son ventre. Putain de merde. Pourquoi fait-il cet effet-là ? « Qu'est-ce qu'il s'est passé? Il va bien au moins? » s'exclame-t-il. Son regard divague jusque la fenêtre pour épier le paysage. Evidemment, il est là pour son fils. « Un malaise, ni plus ni moins. lance-t-elle, d'un ton détaché. et ne t'en fais pas, IL va très bien. » se contente-t-elle de dire. Elle ne le regarde même pas. Aux dernières nouvelles, c'est elle qui est tombée raide, non ? Apparemment, cela ne l'alarme pas plus que ça. Mais bon, après tout, c'est elle qui est parti, elle l'a bien cherché.

Clyde entend son coeur battre fort. La peur? Peut-être bien. Maintenant qu'il avait perdu Alma, s'il venait à perdre son fils à naitre... Il ne s'en remettrait pas. Il claquerait sûrement d'une overdose quelque part. Un endroit sordide où se rendent les coeurs brisés dans son genre. C'est ce qui était prévu d'ailleurs. Avant tout ça, avant qu'Alma ne rentre dans sa vie et n'y chamboule tout. Mais les mots qu'Alma prononce le rassure rapidement, pourtant, son coeur continue de s'essouffler. Ce n'est pas la peur. C'est pire que ça. Clyde finit par poser les yeux sur Alma, visiblement éreintée. Quelque chose se passe dans le creux de son ventre, quelque chose qu'il préférerait ignorer. Impossible. Il s'en était peut-être rendu compte trop tard mais la vérité à propos de ce qu'il ressentait pour Alma, Clyde la connaissait déjà. Attendri, il a envie de s'approcher d'elle et de la prendre dans ses bras. Interdit. Alors il reste planté là sans trop savoir quoi faire. De toute façon, elle ne le regarde pas. Le lien est rompu. « Ni plus, ni moins? » Et puis merde, il fait un pas vers elle. Deux. Plus il s'approche, plus son rythme cardiaque s'affole. Alma lui avait manqué. Beaucoup trop. Clyde se tient à côté de son lit et, tout de même un peu hésitant, il vient poser une de ses mains sur le front d'Alma. L'autre main vient naturellement à la rencontre de son ventre arrondi par la grossesse. Dans le pire des cas, Alma le chasserait. Il ferait pas d'histoires, il comprendrait. « Toi, t'as vraiment une sale tête en revanche. » Clyde sourit doucement, caresse du pouce le front d'Alma. Il se sent un peu mieux, c'est comme s'il avait oublié tout ce qui avait pu se passer entre eux l'espace de quelques minutes. Des minutes qui passent vite. Trop vite à ses yeux. Il soupire et s'écarte. Il avait pas le droit de faire ça, il venait de s'en souvenir. Clyde se met dans un coin de la chambre d'hôpital et il laisse à nouveau son regard divaguer à travers la pièce. Un silence s'installe à nouveau entre eux. C'est pesant. Clyde sait plus quoi dire. Il se mord l'intérieur de la joue nerveusement, attend que ce moment gênant passe.

Ses sentiments sont mitigés lorsqu'elle voit la silhouette de Clyde à son chevet. C'est beaucoup trop tôt. Les cicatrices qu'il a pu laisser ne sont même pas refermer. Son nom la hante depuis qu'elle est partie. Clyde. Clyde, le père de son fils, Clyde, l'homme qu'elle chérissait un peu trop. L'aime-t-elle encore ? Elle ne sait pas. Sûrement. Après tout, des sentiments de la sorte ne s'effacent pas comme un simple coup de crayon. Oh bien sûr, il y a les mots qu'il a pu prononcer aussi. Il n'y a qu'elle. Seulement elle. Mais le fait qu'il ait pu s'abandonner dans les bras d'une jolie blonde ne la rassure pas quand au sérieux de leur relation. Il l'a fait une fois, il peut très bien recommencer. Et ça, elle ne le veut pas. Elle ne veut pas passer son temps à souffrir à cause d'un homme qui a su toucher son coeur. « Ni plus, ni moins? » répète-t-il. Ouais, ni plus ni moins. Elle n'a pas envie de se lancer dans un long discours expliquant qu'elle a tellement pleuré depuis qu'elle l'a quitté qu'elle en est tombé de fatigue. A quoi bon de toute façon ? Cela ne changerait rien à la situation actuelle. Ils seront toujours au bord du gouffre. Un pied sur terre, un pied dans le vide. « j'suis montée sur un escabeau, j'suis tombée, fin de l'histoire. » se contente-t-elle de dire. Il y a rien d'autre à dire. Sa petite voix enjouée est bien loin. Son ton est incroyablement calme, faible même, stigmate de sa fatigue. Ses yeux contre la fenêtre, elle aimerait tellement les retourner. Juste pour le regarder, rien que quelques secondes. Pour retrouver son beau visage. Mais c'est au-dessus de ses forces. Cela lui rappelle trop la dernière fois qu'ils se sont parlés. Elle entend un bruit de pas. Puis deux. Ne fais pas ça Clyde, c'est beaucoup trop douloureux. Qu'il reste éloigné, qu'il ne lui fasse pas du mal, encore une fois. Rien de physique, juste psychique. Sa main se plaque sur son front. Son coeur rate un battement. Il est là, plus près que jamais. Puis la seconde vient épouser la forme de son ventre. Bébé bouge, encore une fois. Elle ne sait pas si Clyde le sent, mais elle oui. « Toi, t'as vraiment une sale tête en revanche. » remarque-t-il. Bien sûr, qu'elle a une sale tête. Elle a des valises sous les yeux, dont un est violacé. Ses nuits sont courtes, les journées sont longues, interminables. Un calvaire. « j'te retourne le compliment. » réplique-t-elle, tournant la tête. Elle croise ses prunelles, un instant. Celles qui l'ont fait craquer. Et puis elle détourne le regard, lui s'éloigne. Cette situation résume parfaitement leur relation. Proches un instant, si éloignés par la suite. Un silence de plomb. Elle lâche un soupir, trouve finalement le courage de poser ses yeux sur lui. « j'déteste les médecins qui t'ont fait venir ici. » lâche-t-elle, assise sur son lit.

Clyde devrait déjà avoir foutu le camp. Après tout, si son enfant va bien, le reste ne le regarde pas. Et pourtant il n'arrive pas à s'y résoudre. C'est Alma, la mère de son enfant, l'adolescente qu'il aime. Avec la tête qu'elle avait, Clyde ne pouvait tout simplement pas claquer la porte de l'hôpital sans savoir ce qu'il se passait. « j'suis montée sur un escabeau, j'suis tombée, fin de l'histoire. » Même le ton de sa voix inquiétait Clyde. Il comprend pas trop, n'arrive même pas à envisager que c'est peut-être à cause de lui qu'Alma est dans cet état-là. Il répond rien. Pas même un soupir. Il s'approche. Un peu trop. Il essaye de retrouver Alma, de retrouver cette symbiose qu'il y avait entre eux, mais à la place il finit par se rappeler que le temps où ils s'entendaient bien était révolu. « j'te retourne le compliment. » Clyde hausse les épaules. Il ne sait pas vraiment à quoi il ressemble en ce moment. Il a jamais été du genre à passer beaucoup de temps devant le miroir. Depuis l'incident qui les a séparé, il ne l'a quasiment plus fait. Un bonjour du bébé, un frisson, et Clyde s'éloigne. C'est pour le mieux. Il avait déjà fait trop de dégâts ici. Ouais, c'est sa faute tout ça. Il aurait pu éviter qu'ils se retrouvent dans une situation pareille. D'ailleurs, si Clyde n'avait pas vu cette fille, Alma n'aurait pas eu besoin de crécher ailleurs. Il aurait été là pour monter sur l'escabeau et elle ne serait jamais tombé. Clyde se sent écrasé par la culpabilité. Le silence. Plus rien. Clyde se dit qu'il ferait peut-être mieux d'y aller après tout. « j'déteste les médecins qui t'ont fait venir ici. » Clyde lance un regard abattu à Alma. Vraiment? Il finit par regarder ailleurs, blessé. D'ailleurs il essaye de pas trop le montrer mais son visage est déformé par la tristesse. Et puis la colère. « Ouais et je l'aurais su comment que la mère de mon gosse ressemble à un putain de zombie? C'est bien que tu sois ici, j'espère qu'ils vont te garder. » Clyde a détourné le regard. Il regarde ses pieds. A moins que ce soient ses mains. Quoi qu'il en soit, on peut sentir la colère dans sa voix. « Et puis t'en fais pas, je reviendrais pas. » Mais c'est rien par rapport à ce qu'Alma lui avait dit. La douleur est encore là. Alors dans le but de se soulager définitivement, Clyde enchaine. « Je suis pas venu pour toi de toute façon. » Ca sonne faux. Ca l'est. Clyde est venu pour le bébé, oui. Pour Alma aussi.

A la seconde où elle a prononcé ces mots, Alma sait comment tout cela va finir. Clyde va lancer son fameux regard plein de reproches, entre colère et déception. Et puis les noms d'oiseaux font fuser, Alma va également s'énerver et va crier à son tour. Cela va devenir une véritable cacophonie, où l'un et l'autre auront l'impression de parler dans le vide. C'est toujours comme ça entre eux. C'est pas parfait mais passionnel. Bingo. Elle sent son regard courir sur sa peau. Il la brûle. De reproches, de colère. Ca lui donne mal au ventre cette histoire. Un putain de mal au ventre depuis des mois et des mois. Pas les nausées matinales, non loin de ça. Autre chose, d'indescriptible. Et puis, ça lui donne mal au coeur aussi. De le voir ici, sans pouvoir le toucher. Comme si elle se trouvait dans un piège de cristal. « Ouais et je l'aurais su comment que la mère de mon gosse ressemble à un putain de zombie? C'est bien que tu sois ici, j'espère qu'ils vont te garder. » crache-t-il. Premier round. Ce sera à qui sera le plus fort, à qui fera le plus mal à l'autre. Il est plutôt bien parti, Clyde. Elle reste un moment silencieuse, puis secoue la tête par la positive. Surtout garder son calme pour ne pas perdre la bataille. « ouais. j'ai pas l'droit de sortir de toute façon. je suis 'trop faible'. » dit-elle. D'ailleurs le violent bip qui raisonne du monitoring est là pour le lui rappeler. Clyde reste toujours à distance, comme pour ne pas se brûler. « Et puis t'en fais pas, je reviendrais pas. » lance-t-il. Bam. Premier uppercut dans l'ventre. Ca fait horriblement mal. « Je suis pas venu pour toi de toute façon. » finit-il par dire. Il l'achève, sans ménagement. La met à terre pour ne pas se relever. Elle l'avait cherché de toute façon, à l'attaquer de la sorte. Le monitoring sonne, une nouvelle fois. « stop ! » s'écrit-elle. Un silence raisonne, puis un rire. Cela d'Alma, se rendant compte de la situation. Pathétique. Ils en arrivent même à se disputer dans un hôpital alors que l'un des deux va mal. A quoi ça rime tout ça ? A rien. Elle soupire, essaye de reprendre son calme. « t'as une drôle de façon d'me dire que tu m'aimes, tu le sais ça ? » lâche-t-elle, triturant ses doigts. Une occupation pour ne pas le regarder, encore et encore. Un spectacle dont elle ne se lasse pas.

Alma avait commencé les hostilités. Clyde n'avait fait que rétorquer, cherchant à préserver le peu de fierté qui lui restait depuis qu'elle était partie. Pourtant, encore aujourd'hui, il ferait tout pour qu'elle revienne. La solitude était juste en train de le tuer à petit feu. Seulement il n'en dira rien. Pas après ce qu'elle venait de dire. A quoi bon? La présence de Clyde n'était même pas désiré en cas d'accident, il se doutait bien qu'il ferait face à un non catégorique s'il lui proposait à nouveau de revenir. C'est comme ça qu'il avait espéré que ça finirait. Bien. Alma aurait eu un peu de temps pour réfléchir et elle aurait fini par revenir. Mais non. Trop faible? Tant mieux. Clyde ne dit rien mais il est bien content de le savoir. Il veut le mieux pour Alma et leur bébé. Autant dire que pour le moment, c'était plutôt loupé avec les derniers événements en date. Mais en plus si Alma commençait à perdre la forme physiquement... Il secoue la tête doucement, ça n'annonce rien de bon. Clyde continue de vomir des mensonges. C'est assez gratuit. Il veut juste lui faire mal. Comme elle lui avait fait mal. Un cri. Stop. Clyde reste un instant sans mot, complètement hébété. Comment ça "stop"? Les règles avaient-elles changé sans que Clyde ne s'en rende compte? La victoire n'était-elle pas à celui qui frappera le plus fort? Il garde le silence. Peut-être qu'elle en avait simplement marre de jouer. Et puis Clyde la regarde. Si faible, si vulnérable. Il commence à ressentir de la culpabilité, il aurait pas du faire attention à ce qu'elle avait dit. Clyde aurait du sagement encaisser même si ça avait été horriblement douloureux. Alma rigole. Clyde reste interdit. Il attend. Le déluge peut-être mais il attend. Ca finit par arriver. Clyde aurait pu prendre à nouveau la mouche, prétendre qu'il ne l'aime pas. Mais non. Il sourit légèrement. « Moi je les aime bien les médecins qui m'ont fait venir ici. » L'ultime vérité, comme un cri du coeur. Clyde reste malgré tout à distance. C'est pas qu'il en ait pas envie. Il adorerait au contraire passer la journée à son chevet, à tenir sa petite main dans la sienne. Il ferait des aller-retour entre le distributeur de l'hôpital et la chambre d'Alma, il prendrait soin d'elle. Ca se serait passé comme ça s'il avait su la garder. Seulement tout est différent aujourd'hui. Ils sont là, tous les deux brisés de s'être trop rapproché l'un de l'autre.

Un silence retentit. Stop. Stop stop stop. Elle en a trop entendu, elle a trop pris sur elle. Et ça lui fait mal. Ça lui fait mal de voir que la relation qu'ils ont pu avoir durant cette semaine est complètement parti en fumée. Fini les regards complices, fini les mots doux, fini les câlins. Il n'y a plus rien. Juste la colère et les mots plus hauts que les autres. Ils sont juste face a face, tels deux inconnus. A se balancer des noms d'oiseaux. Elle pensait que ça la soulagerait, mais non. Ça fait mal. Les cicatrices s'ouvrent de nouveau. Pourtant, elle est heureuse de l'avoir devant lui. Revoir son doux visage a quelque chose d'apaisant. Oui, il apaise la peine qu'elle a pu avoir depuis son départ. Et puis, il est la après tout. Il aurait très bien pu refuser de venir. Mais non, il est bien la, devant elle, avec sa tête de dépité. Elle se garde bien de le lui dire, bien trop fière pour ça. Il sourit légèrement, lui dit que contrairement a elle, il est content d’être ici. Clyde a l'art et la manière de trouver les bons mots. Elle baisse la tête, sourit. Même sa voix lui a manque. Tout son être lui a manque. Terriblement. Cruellement. Il ne faut pas. Il a faute, il doit en payer les conséquences. Mais elle est incapable de lui en vouloir une fois qu'il est devant elle. « j'les déteste parce que le fait que tu sois la devant moi prouve a quel point tu me manques » déclare-t-elle. C’était pathétique. Elle ne devrait pas dire ça. Pas a lui. Peut-être a Swen, quand elle pleure sur son épaule. Mais pas a Clyde. Cela montre sa faiblesse, encore une fois. Elle lâche un soupir, regarde ailleurs. Elle ne veut pas affronter ses prunelles. Il va dire quoi, lui ? Qu'elle n'avait qu'a pas partir. Aussi simple que cela. Et il aura raison, quoiqu'il arrive. « j'crois que je t'aime. Encore plus quand j'te vois ici. » avoue-t-elle. Bravo Alma, tu t'en sors comme une chef. Ou pas. Ridicule. Elle se giflerait si elle le pouvait. Son oeil la fait terriblement souffrir. Elle grimace, le touche. Au même moment, la porte s'ouvre. Une infirmière entre, tout sourire. Elle ne va pas le garder longtemps aux vues du tableau sous ses yeux. « c'est l'heure de votre échographie mademoiselle valhallens. » lance-t-elle. Alma regarde Clyde, ses yeux lui crient de bien vouloir rester, de voir l’évolution de leur petit garçon. Mais pas un seul mot ne sort de sa bouche. Elle n'y tout simplement pas.

Un sourire. Faible. Mais là quand même. Ca réchauffe Clyde, il sourit lui aussi. Il l'air un peu débile à sourire comme ça. Tant pis. Ca le soulageait beaucoup plus que de s'en prendre à Alma. Depuis quand est-ce qu'il n'avait pas esquissé le moindre sourire? Depuis qu'elle était partie. Clyde pouvait faire ce qu'il voulait, il en revenait toujours là : le jour où Alma avait claqué la porte de son appartement. Et il regrette. « Tu me manques aussi » répond-il simplement. C'est pas vraiment la vérité. S'il avait voulu être tout à fait honnête, il aurait du raconter qu'il était en train de crever sans elle, qu'il faisait plus rien, qu'il attendait simplement que le temps passe depuis qu'elle était partie. Clyde avait passé son temps à comater sur son canapé. Triste mais vrai. C'est bête mais il rougit quand Alma lui dit qu'elle l'aime. Il sait plus vraiment où regarder, ça le gêne. On lui avait jamais fait de déclaration d'amour, il savait juste pas comment réagir. D'habitude, on lui dit plutôt l'inverse. Alma a mal, Clyde le remarque bien mais n'a pas le temps de faire quoi que ce soit : quelqu'un entre. Une infirmière. Pourvu que ce soit pas le moment où on lui dit qu'il faut qu'il la laisse se reposer. C'est pas ça. Une échographie. Clyde passe une main dans ses cheveux, il a l'étrange sensation qu'il est pas à sa place. Il en a déjà vu des échographies, celles qu'Alma ramenait. Il l'avait pourtant jamais accompagné. Et puis, il croise le regard d'Alma, hoche une fois la tête en signe d'approbation. Plus d'hésitation, il sait qu'il est là où il faut. Pour une fois.

Clyde sourit. Cela lui met du baume au coeur. Elle l'aime, son beau sourire. De toute les façons. Celui pour la rassurer. Celui pour rire de ses blagues. Et le plus beau, celui qui lui fait comprendre qu'elle est unique, qu'elle est la seule qui compte à ses yeux. Ouais, le manque de son sourire à laisser un vide, en même temps que lui. Toi aussi tu me manques. Voilà mot pour mot ce qui sort. Elle le fixe, se rappelle des bons moments passés avec lui. Oh, elle pourrait craquer et lui pardonner. Mais en est-elle capable ? Après tout, qui lui dit qu'il ne s'est pas retrouver dans les draps d'une autre, encore une fois ? Personne. Clyde a disparu de sa vie en même temps qu'elle a passé le pas de la porte. Silence radio, elle n'a pas entendu parler de lui et sait encore moins ce qu'il a pu faire. Mais comme dit l'adage, on a tous droit à une seconde chance. Mais la mérite-t-il ? C'est le bordel dans sa tête. Un foutoir complet. Elle n'arrive pas à réfléchir, cela lui donne mal à la tête. « mais tu restes quand même le p'tit con qui m'a brisé l'coeur. » lance-t-elle, accompagné d'un soupir. Elle veut lui montrer qu'elle a mal vécu cette histoire, qu'il n'est pas le seul à en pâtir. Cette histoire, elle la bouffe, complètement. Elle lui ronge le cerveau, lui émiette le coeur. L'infirmière présente, Clyde secoue la tête par la positive. Pour la première fois depuis sa grossesse, elle ne sera pas seul. Elle aura quelqu'un à ses côtés pour admirer son petit garçon. Leur petit garçon. Chaque centimètre de son épiderme sera un parfait mélange Valhallens-Wright. Rien que d'y penser, un léger frisson la parcoure. Un dernier sourire compatissant, l'infirmière passe du gel au creux de son ventre arrondi, puis allume l'écran. La suite n'est que plus merveilleuse. Dans ce brouillard noir et blanc, un corps. Une tête, des bras, des jambes, un tronc. La vie. Leur vie. « regarde clyde, c'est notre bébé... notre petit garçon...» dit-elle, un sourire illuminant son visage. Toute les disputes, les mots plus haut que l'autre se sont volatilisés. Il n'y a plus que cet instant magnifique.

Le petit con qui lui a brisé le coeur... Clyde baisse la tête. Ouais, c'est vrai, il avait tendance à être décevant. Même qu'Alma avait plutôt eu de la chance, Clyde s'était comporté correctement avec elle. Enfin mieux qu'avec les autres ce qui est déjà un grand pas pour lui. Ca n'avait malheureusement pas été assez pour Alma. Pauvre enfant qui va naitre entre deux parents qui s'aiment trop. Clyde essayera. Encore et encore. Aussi longtemps qu'il ressentira ces choses si fortes à propos d'Alma. Il essayera de la reconquérir. Mais là, dans cette chambre d'hôpital, les mots ne viennent pas. Il se sent misérable, défroqué. Quel genre de monstre faut-il être pour briser le coeur de la fille qu'on aime? S'il était capable de se pardonner pour sa mère et ses frères, Clyde n'était pas prêt de le faire dans ce cas précis. Et pour cause, il y a un enfant en jeu. Leur enfant. Quand Clyde relève la tête, l'infirmière est déjà là. Elle prépare Alma à l'échographie. Clyde se sent tendu. Impatient surtout. Il allait voir son bébé. En vrai cette fois. La bouche grande ouverte, il regarde l'image qui se forme sur l'écran. Son petit garçon. « Enchanté... » Clyde s'était rapproché instinctivement d'Alma, il avait glissé ses doigts dans ses cheveux. C'était leur moment rien qu'à eux. Il souriait, rêveur. Ce petit être, il le voyait déjà dans ses bras. Il le voyait déjà gambader dans son appartement. Dans ses visions, il y avait toujours Alma non loin. Toujours. « J'ai hâte qu'on soit tous les trois réunis. » C'est dit, Clyde n'a pas abandonné.

Il n'y a pas de mots pour exprimer les sentiments d'Alma face à cet écran. C'est la chair de sa chair, le sang de son sang qui se trouve là, devant elle. Elle a du mal à imaginer qu'elle ait pu faire ça. Que cette petite crevette grandit dans son ventre de jour en jour. Elle est à la fois émerveillée, pressée, inquiète. Ouais, elle a peur. Elle a peur de ne pas être à la hauteur, peur de ne pas être une bonne mère, peur de ne pas rendre cet enfant heureux. Après tout, c'est normal d'avoir peur non ? Ca prouve que cette histoire la prend aux tripes, qu'elle ne veut pas faire le moindre faux pas. Elle veut que plus tard, cet enfant soit fière d'elle. Qu'il dise haut et fort qu'il n'a jamais manqué de rien, qu'il a eu le privilège d'être aimé par ses deux parents. Cela sera sa plus belle victoire. « Enchanté... » dit-il alors qu'elle sent sa présence derrière elle et ses doigts se fondre dans ses cheveux. Une réelle connexion s'est installée. Sans mots, sans regards. Juste leur prunelles rivés sur le corps presque formé de leur fils. Son sourire s'agrandit de plus belle. Pour la première fois depuis des semaines, elle a vraiment l'impression qu'ils forment une famille. Le battement de coeur du foetus vient raisonner dans la pièce. Cela rend la situation encore plus réelle. Clyde va-t-il prendre la fuite comme il sait si bien le faire ? Il y a peu de chances. Il a changé, est devenu un homme. Un père et un chef de famille, bientôt. « J'ai hâte qu'on soit tous les trois réunis. » lâche-t-il. Elle tourne la tête vers lui, le toise un moment. Un léger sourire étire ses lèvres, puis elle attrape sa main pour entremêler ses doigts aux siens. « c'est pour bientôt. » répond-elle. Une promesse qu'elle allait revenir à la maison ? Peut-être. Sûrement même. Elle ne veut pas rester loin de lui, elle ne peut pas. Elle a trop besoin de lui. Alors c'est ça, être amoureuse ? Etre dépendante de la personne désirée ? Elle est dans une sacré merde alors. L'infirmière annonce que tout va parfaitement bien, remballe son matériel pour quitter discrètement la chambre. Elle se mord les joues, se sent mal, d'un seul coup. Elle a quelque chose à lui avouer. Mais doit-elle le faire au risque de le perdre ? Finalement, elle se relève du lit, péniblement. Elle se place face à la fenêtre. « il faut que je t'avoue quelque chose, clyde. » dit-elle, croisant ses bras. Elle n'a pas craché le morceau qu'elle a déjà peur de sa réaction. « je... j'ai couché avec un autre. » finit-elle par dire, n'osant pas affronter son regard. Elle le voit déjà crier, et claquer la porte. Et elle ne le veut pas, oh non. Alma veut qu'il reste auprès d'elle, comme avant.

Clyde est émerveillé. Il prend de plus en plus conscience de la réalité des choses. Cette chose qu'on aperçoit à l'écran, c'est son fils. Il allait naitre, faire son bonheur et l'appeler papa d'ici quelques temps. Comment ne pas être bouleversé? Clyde se sent enfin entier. Avant, il n'était que chaos. Enfant perdu. Doucement, il trouve son chemin. Non, il n'aurait jamais pensé il y a quelques mois en apprenant qu'Alma portait son enfant que ça allait le changer à ce point. A ce moment-là, Clyde ne s'était pas vu une seule seconde assumer cette connerie. Il avait même voulu éjecter le môme de sa vie. Il s'était résigné. Evidemment. Sa plus belle connerie au final. Il est fier, Clyde. Fier d'assister à une scène pareille, fier de ne pas être parti. Il serait passé à côté de la plus belle expérience de sa vie. Sans aucun doute. Les doigts d'Alma viennent trouver ceux de Clyde, ils s'entremêlent avec un naturel déconcertant. D'ailleurs, il semble même pas le remarquer tant ça semble évident. Bientôt. Clyde est touché. Peut-être un peu trop. Il en attendait pas autant d'Alma. Il garde le silence, adresse un sourire ému à cette mère en devenir qu'il aime plus que de raison. L'infirmière s'éclipse et les futurs parents se retrouvent seuls. L'ambiance est tendue et Clyde n'arrive pas à cerner le problème. Il y a cinq minutes, il aurait juré qu'Alma avait fait allusion à son retour à l'appartement... Et là? Là, elle s'éloignait. Difficilement, elle s'était dirigée vers la fenêtre. Clyde attend, fronce les sourcils. Vraiment, il ne comprend pas. Finalement, il déglutit quand il comprend qu'ils vont parler sérieusement. Il s'attendait à plein de choses. Pas à ça. Il a horriblement mal. C'est donc ça que de se sentir trahi... Clyde l'apprenait à ses dépends. Il ne bouge pas. Vaut mieux pas. « Waw, Alma. » gronde-t-il, mauvais, depuis le fond de la pièce. « C'est merveilleux. Vraiment.  » Clyde pivote sa tête histoire de ne plus avoir Alma dans son champ de vision. Ouais, c'est bête mais même de dos la voir était insupportable. Il digère la nouvelle. Pas très bien d'ailleurs, il a sérieusement envie de vomir. Dégueuler sa haine sur Alma. Pas une si mauvaise idée que ça. « Et dire que j'ai culpabilisé... Si j'avais su, c'est moi qui t'aurais foutu dehors. Je t'aurais jamais laissé me faire sentir si minable si j'avais su que t'étais capable de... Laisse tomber. » Clyde souffle, se dirige vers la porte. Il est dégouté. Partir c'est encore la meilleure chose qu'il pourrait faire. Mais il reste bloqué devant la porte, incapable de toucher la poignée. « Putain Alma! C'était MON enfant entre toi et ce batard! » Il fait demi-tour, s'approche d'Alma en restant tout de même à une distance raisonnable. Il veut juste voir son visage, voir l'impact qu'ont ses mots sur elle. « Tu sais quoi Alma? Quand t'auras sorti notre enfant de là, tu iras te taper qui tu veux. En attendant, essaye simplement de garder les cuisses fermées,. »

La honte a emparé la totalité de son être. Quel mouche l'a prise ce soir-là ? Pourquoi a-t-elle fini dans ce lit, s'abandonnant complètement à Dmitri ? Elle ne sait pas. Mais il y a bien une chose qu'elle sait : elle n'aurait pas dû. C'était et c'est mal. C'est irrespectueux envers lui. Putain de merde, c'est pas n'importe quel mec. C'est le père de son fils. L'homme qui fait battre son coeur. Et elle elle a trouvé le moyen de foutre en l'air le peu d'amour qu'il avait envers elle. « Waw, Alma. C'est merveilleux. Vraiment. » lance-t-il, ironiquement. Elle tourne la tête vers lui. Lui, son regard divague ailleurs. Ca fait mal. Elle se sent comme une moins que rien. Finalement, c'est peut-être ce qu'elle est. Une moins que rien. Une moins que rien que son père n'a pas voulu connaître. Une moins que rien qui a déçu sa mère. Et aujourd'hui, une moins que rien qui a déçue l'homme qu'elle aime. « je-je me sentais trahie, et abandonnée, j'étais vraiment mal et... c'est arrivé comme ça, j'voulais seulement que tu comprennes combien ça fait mal. mais c'était une erreur. j'm'en fou de lui, y'a que toi qui compte. » tente-t-elle d'expliquer sans se laisser submerger par ses émotions. A quoi bon le faire ? Elle sait qu'à l'instant où elle allait lui dire la vérité, Clyde allait se braquer, quoiqu'elle dise. Mais pourtant, c'est vrai. Il n'y a que lui qui compte. Son visage reste gravé dans sa mémoire. Même ce soir là, il ne l'a pas quitté. « Et dire que j'ai culpabilisé... Si j'avais su, c'est moi qui t'aurais foutu dehors. Je t'aurais jamais laissé me faire sentir si minable si j'avais su que t'étais capable de... Laisse tomber » crache-t-il, plus mauvais que jamais. Alma ne bouge pas, elle n'ouvre même pas la bouche. Elle encaisse, tant bien que mal, même si elle a l'impression de se prendre un uppercut en pleins dans l'estomac. Elle manque d'air, se sent démunie. Alma entend les pas de Clyde s'éloigner. Elle ferme les yeux et lâche un soupir. Mais finalement, ses pas se rapprochent d'elle. « Putain Alma! C'était MON enfant entre toi et ce batard! » s'écrit-il. Elle déglutit avec difficulté. Elle lui fait face par la suite, ses prunelles se plantent dans les siennes. « et TON enfant était aussi là quand tu t'es tapé cette conne dans l'appartement où on habitait tout les deux, t'as l'air de l'oublier! » s'exclame-t-elle à son tour. Oh bon sang, il a un sacré toupet. Comment ose-t-il dire ça alors qu'il y a quelques temps, c'est lui qui a fauté ? Il devrait être compréhensif, au lieu de cela, il s'amuse à la mettre plus bas que terre. « Tu sais quoi Alma? Quand t'auras sorti notre enfant de là, tu iras te taper qui tu veux. En attendant, essaye simplement de garder les cuisses fermées. » finit-il. Il l'achève. Cette phrase raisonne dans sa tête. Elle l'a atteint. Elle attrape son poignet. « tu penses vraiment ce que tu dis ? demande-t-elle, avant de le lâcher et de secouer la tête par la négative. non, j'ferais pas ça. j'irais plus voir ailleurs. j'tiens trop à toi pour ça. » finit-elle par dire, en espérant que son discours ait un impact sur lui.

Alma s'explique, Clyde peine à écouter. Il veut pas entendre, il veut pas savoir. Il aurait peut-être même préféré qu'elle dise rien. Elle aurait simplement pu rentrer chez eux, elle aurait pu garder sa vendetta secrète. Ouais, on peut dire qu'ils sont quittes. Sauf que Clyde ne l'entend pas de cette oreille. Il est blessé. Il est passé d'un extrême à l'autre, de l'euphorie totale à la colère. C'était pas que de la simple jalousie, non. Clyde s'était ouvert à Alma, il lui avait dit à quel point il tenait à elle. Il l'avait laissé partir et ça avait déjà largement suffit à l'accabler. Pourquoi rajouter ça? « Tu voulais que je comprenne combien ça fait mal? Tu voulais juste te venger? Mais comment tu peux être si mesquine?! » Bien sûr que Clyde se braque. Alma pourrait mettre un genoux à terre et le demander en mariage qu'il continuerait à pester contre elle. Contre ce mec aussi. Bordel, si Clyde apprend qui c'est... Quel genre de connard se tape une ado enceinte? S'il faut pas être tordu! Ou complètement abruti. Ou être le père du gamin. Bref. Clyde attaque Alma, elle riposte. Au final, ils sont plus doués pour se faire la guerre que pour s'aimer. Oeil pour oeil, dent pour dent, pas vrai? « Je t'en prie, je partage pas mon corps avec lui moi! Fais pas ça. Essaye pas de me convaincre que je ferai mieux d'être compréhensif parce que j'ai merdé avant aussi... Je l'ai pas fait avec de mauvaises intentions, je voulais juste savoir si... Bref, tu l'as fait pour te venger; pour pouvoir me faire penser qu'on va pouvoir se rabibocher et ensuite me balancer cette saloperie à la gueule. » Clyde est injuste. Il devrait passer l'éponge mais c'est au dessus de ses forces. Pas tout de suite. Peut-être un jour. Quand il se sentira moins con. Le fait de balancer des horreurs à Alma l'aide pas vraiment d'ailleurs. Peu importe, il le fait quand même et il le fait bien. Une pression sur son poignet, Clyde lance un regard assassin à Alma. Elle le lâche rapidement, essaye de le raisonner, de faire appel à ses sentiments. « Trop mignon. » lâche-t-il ironiquement à l'attention d'Alma. Un sourire. Pas un de ces beaux sourires dont Clyde use quand il est content. Loin de là. C'est un de ces sourires qui annoncent rien de bon. « C'est fou parce que c'est exactement ce que je t'ai dit et... T'es quand même partie. »

Alma se sent impuissante face à la situation. Elle ne sait que dire et faire pour convaincre Clyde de sa bonne foi. Bon, okay, les circonstances ne l'aident pas vraiment. Oui, elle l'a bien cherché. Elle a fait sa garce, elle assume maintenant. A croire qu'elle aime se faire du mal. Elle inspire profondément pour ne pas craquer et dire quelque chose qu'elle pourrait regretter. Elle a fait assez de mal comme ça. « Tu voulais que je comprenne combien ça fait mal? Tu voulais juste te venger? Mais comment tu peux être si mesquine?! » dit-il. Clyde ne l'épargne pas, ne fait rien pour qu'elle se sente mieux, au contraire. Elle se sent plier sous le poids du mal-être et de la culpabilité. « je sais pas clyde. je sais pas. c'est bien ça le pire. » souffle-t-elle. Elle perd pieds, encore. Comme à chaque fois qu'elle entre en conflit avec lui. Elle est à bout d'arguments. Oui, elle a fait l'amour à un autre homme. Mais bordel, il devrait s'estimer heureux qu'elle lui dise la vérité. Elle aurait pu se taire, oh oui, puis faire comme si rien ne s'était passé. Et puis, un jour, cette histoire aurait fini par se savoir. Quelqu'un aurait balancé le morceau. Et ce serait le bébé qui en aurait pâti. « Je t'en prie, je partage pas mon corps avec lui moi! Fais pas ça. Essaye pas de me convaincre que je ferai mieux d'être compréhensif parce que j'ai merdé avant aussi... Je l'ai pas fait avec de mauvaises intentions, je voulais juste savoir si... Bref, tu l'as fait pour te venger; pour pouvoir me faire penser qu'on va pouvoir se rabibocher et ensuite me balancer cette saloperie à la gueule. » déclare-t-il. Bon sang qu'il est borné. A s'en taper la tête contre le mur. Comment instaurer un dialogue alors que la personne en face de soi ne s'y prête pas ? Elle s'énerve. Le fait qu'il essaye de retourner la situation l'énerve encore plus. « oh oui, c'est vrai que tout les hommes couchent avec d'autres filles pour savoir s'ils en aiment une autre, c'est bien connu. » rétorque-t-elle, accompagné d'un rire ironique. Leur relation tangue. Semblable à une danse, ils font un pas en avant, deux pas en arrière. Voir trois, comme en ce moment. Elle est à deux doigts de déposer les armes. A s'avouer vaincue et à laisser tomber. Le visage du jeune homme change, empruntant l'attitude de l'ancien Clyde.« C'est fou parce que c'est exactement ce que je t'ai dit et... T'es quand même partie. » lance-t-il. Elle s'immobilise, un instant. Ouais, il a raison. Elle s'est cassé, alors qu'il lui a déballé ses sentiments les plus sincères. Alors pourquoi lui resterait ? « alors on fait quoi, maintenant ? tu vas claquer la porte, et on oublie tout ce qu'il s'est passé, c'est ça ? moi j'ai ais pas envie. » demande-t-elle, lâchant un soupir. Une impasse dont elle n'est pas sûre d'en sortir indemne.

Clyde se prend la tête entre les mains. Il a mal d'un coup. Comme des envies de meurtre. Il en veut à Alma, c'est sûr. Quand il la regarde pourtant, ce ne sont pas des envies de meurtres passionels qui lui viennent. Ça fait chier. Clyde sait qu'il l'aime. Plus que tout, plus qu'une erreur, plus que sa fierté. Sa colère vient tout droit du coeur, de ce qu'il peut ressentir pour elle. Seulement il la pensait pas comme ça. Alors il doute. Peut-être qu'elle n'est pas celle qu'il croit, peut-être qu'il s'est trompé. Ou alors il avait réussi à faire ressortir le pire en elle. Clyde a cet effet négatif. Souvent. Alma l'avait dit. Il l'avait rendu dingue. Chacun son tour. Alma sait pas. Pourtant Clyde aimerait savoir ce qu'il lui a pris. Mais il saurait pas et, effectivement, c'est bien ça le pire. N'était-ce qu'une erreur ou Alma avait-elle vraiment cherché à causer du tort à Clyde? La raison et le coeur de Clyde se livrent un combat acharné. Dommage que Clyde soit pas vraiment habitué à suivre son coeur. « Désolé, j'ai pas trouvé de manuel pour savoir s'il était possible que je sois tombé amoureux de l'adolescente que j'ai accidentellement mise enceinte. Comment je peux être "tous les hommes" quand notre situation est si singulière? » Incroyable mais Clyde avait baissé d'un ton. La colère s'atténuait et laissait place à la douleur d'être trahi. Son coeur continue de battre à tout rompre, la situation continue de lui échapper. Merde. Qu'est-ce qu'il doit faire? Il fait un pas en arrière, s'écarte de quelques centimètres seulement d'Alma. Il a l'impression de même plus pouvoir réfléchir correctement. Pas avec Alma à ses côtés. « J'ai promis de pas oublier. Mais je vais pas faire comme si c'était pas arrivé... Je peux pas. Le truc c'est que je sais même pas si je peux te croire. » Un autre pas en arrière. Il est encore tout près. En fait, Clyde recule à pas de souris. Il espère trouver la force de reste, oh oui. Seulement il sait pas vraiment si c'est possible. « Pourquoi tu veux que je reste? » Clyde soupire, il est fatigué de tout ça. C'est pas ce qu'il avait rêvé pour eux trois, loin de là.

Alors ils sont là, à s'engueuler comme deux chiffonniers. Une dénomination commune entre chaque rencontre. D'habitude, ils s'embrassent, font parfois l'amour et l'histoire s'arrête là. Mais elle le sait, ce ne sera pas le cas aujourd'hui. Les conditions ne sont pas les mêmes. Elle a franchi la limite, a été beaucoup trop loin. Elle en a conscience et s'en mord les doigts. Alma ne veut pas passer à côté de tout cela. Elle ne veut pas. Elle ne veut pas passer à côté de cette histoire, elle ne veut pas passer à côté de son bonheur. Elle ne veut pas passer à côté de ce si beau tableau de famille. Leur petit garçon courant dans le sable, Clyde faisant des pâtés de sable et Alma sur sa serviette, les regardant tendrement. Pourtant, cela paraît tellement loin maintenant. Clyde lui glisse petit à petit entre les doigts, et elle a du mal à le supporter. « Désolé, j'ai pas trouvé de manuel pour savoir s'il était possible que je sois tombé amoureux de l'adolescente que j'ai accidentellement mise enceinte. Comment je peux être "tous les hommes" quand notre situation est si singulière? » dit-il. Ouais, leur situation est singulière. Elle n'aurait jamais imaginé une pareille situation il y a encore quelques mois. Jamais elle n'aurait pensé ressentir autre chose que du dédain pour Clyde, le pote de son frère, l'éternel abruti. « mais si je suis unique à tes yeux, pourquoi tu as fais ça ? je comprend pas. tu savais pertinemment que je pouvais pas passer à côté de cela. » demande-t-elle. Peut-être qu'elle ne lui suffisait pas. Ou la grossesse la peut-être refroidi. Dans un cas ou un autre, durant cet instant, elle n'était plus la seule et l'unique. Et rien que d'y penser, la colère montait. Ouais, elle était jalouse. Voir une autre fille qu'elle autour de lui la rend malade. C'est ça, l'amour ? A gerber. « J'ai promis de pas oublier. Mais je vais pas faire comme si c'était pas arrivé... Je peux pas. Le truc c'est que je sais même pas si je peux te croire. » avoue-t-il. Une flèche décochée en plein coeur. Il n'a plus confiance en elle. Tant pis. Elle va tout faire pour la regagner. Elle fera tout pour leur famille soit réunie. « je vois. après tout, je l'ai mérité non ? j'suis qu'une idiote. » lâche-t-elle, haussant les épaules. Décidément, cette journée est un calvaire, clairement. Elle aurait mieux fait de ne pas se lever. « Pourquoi tu veux que je reste? » demande-t-il. Elle se tourne vers, s'approche, s'arrête à quelques centimètres de lui. « parce que je t'aime et que j'ai besoin de toi, abruti ! lance-t-elle. mais si tu veux partir, fais-le, je ne te retiendrais pas. j'en ais pas la force de toute façon. mais ne reviens pas. je ne suis même pas sûre de le supporter. » s'exclame-t-elle, le dos au mur. Elle a épuisé tout son stock d'arguments. C'est la dernière chance. Soit il reste, soit il part. Si il part, une chose est certaine : elle se laissera couler, sans rien dire.

Clyde se demande s'il ferait pas mieux de prendre un peu de temps pour lui. Digérer tout ça. C'est clair qu'il avait pas été un ange et qu'il était peut-être mal placé pour en vouloir comme à Alma. Mais quand même. Il peut pas ignorer le fait qu'il se sent bafoué. C'est con pourtant. Elle était partie. Au final, il n'était pas prévu qu'ils finissent ensemble. Alma était libre de faire ce qu'elle voulait. En fait, ils n'ont jamais été ensemble. Il y a toujours eu quelque chose pour tout gâcher. Là encore. Comme s'ils allaient toujours trouver un moyen pour contrer le bonheur. Une espèce de malédiction. Bizarrement, même pour Clyde, ça commence à faire trop. Il demande qu'un peu de répit, qu'un peu de bonheur... Mais là, c'est impossible. Pas avec ce qu'il ressent. « Ça paraissait plus facile. Ouais, j'avais peur. M'enfin, c'est plus important maintenant. » Un sourire triste. Effectivement, pourquoi remuer le couteau dans la plaie? Ils étaient ex aqueo. Triste à dire. Mais vrai. C'est ce qu'Alma voulait, Clyde savait maintenant exactement à quel point elle avait du se sentir minable quand elle l'a surpris avec une autre dans les bras. Seulement ça n'arrangeait rien. « T'es pas une idiote, je... » Mais Clyde se tait. Il a pas de mot. Cette fois, il arrivera pas à consoler sa petite Alma. Il en a même pas envie. Pourtant, elle reste sienne. C'est peut-être ça le pire, il peut faire ce qu'il veut... Tout le ramènera toujours à Alma. Il lui a jamais dit. Il aurait peut-être du. Si ça se trouve, elle serait restée. Y'aurait pas eu d'autres mecs dans sa vie, ils auraient été heureux. Un joli petit couple, une jolie petite famille par la suite. Le rêve. Alma s'approche, Clyde déglutit. Pas si près. Il risquait de changer d'avis à tout moment. Trop dangereux. Il détourne finalement le regard. « Tu peux pas me demander un truc pareil. Pas maintenant. » Le ton de Clyde se veut détaché mais on peut y sentir une pointe de crainte. Un ultimatum. Y'a rien de plus effrayant.

Cette histoire allait mal finir. Il ne lui pardonnerait pas, et la laisserait seule, dans cette chambre d'hôpital. Alors ils se verront uniquement pour parler du bébé. Et ça, elle ne le veut pas. Alma, elle veut pouvoir le voir sourire, pouvoir le voir rire, pouvoir le toucher. Et lui dire qu'elle l'aime. Parce que ouais, elle l'aime. Comme une dingue. Étonnant hein, quand on connaît leur passé. Pourtant, c'est bien le cas. Oh oui, ça ne se voit pas. Ils préfèrent se crier à la figure plutôt qu'autre chose. C'est peut-être leur manière de montrer qu'ils tiennent l'un à l'autre. A coups de tromperies. Charmant comme tableau. « Ça paraissait plus facile. Ouais, j'avais peur. M'enfin, c'est plus important maintenant. » lâche-t-il. Alma baisse les yeux. Ca paraissait plus facile, vraiment ? Ils auraient pu être heureux. Cette semaine passée ensemble s'était bien passé, merveilleusement bien d'ailleurs. Elle commençait à imaginer un avenir avec lui. Et lui, il a tout balayé en un coup de rein. Oh, il n'est pas à blamer, elle a fait exactement la même chose. Mais non, ce n'est pas le plus facile. Il a même emprunter le chemin semé d'embûches. « ouais, ça n'a plus d'importance, comme tu dis. » répète-t-elle, ironiquement. Elle est déçue. Déçue qu'il puisse avoir une pensée de la sorte. « T'es pas une idiote, je... » commence-t-il a dire. Alma est pendu à ses lèvres, attends la suite qui ne viendra jamais. Il n'est même pas convaincu de ce qu'il dit. Bien sûr que si, elle est idiote. Idiote de croire qu'il puisse vouloir d'elle de nouveau. « Tu peux pas me demander un truc pareil. Pas maintenant. » déclare-t-il, alors qu'il détourne les yeux. Alma n'aime pas ça. Elle attrape son menton de ses doigts et le force à la regarder, une bonne fois pour toute. « je dois faire quoi pour que tu me crois, clyde ? me mettre à genoux, me rouler par terre, me jeter d'un pont ? » lâche-t-elle. Ouais, elle exagère, mais elle est arrivée à un point où elle ne sait plus quoi faire. « pourtant, il va bien falloir faire un choix, on ne peux pas rester comme ça. pour le bien du bébé. » finit-elle par dire, caressant son ventre.

Malgré tout, Clyde ne regrette pas d'avoir été là pour consoler Alma le fameux soir où leur histoire a réellement débuter. Effectivement, ça avait été le commencement de tout ça. Le bébé d'abord, les disputes par après, l'amour ensuite et... à nouveau les disputes. Sans répit. Pourtant Clyde a jamais été aussi heureux. Ni aussi malheureux à vrai dire. C'est comme si Alma avait le bonheur si fragile de Clyde entre les mains. Qu'il parte ou qu'il reste, Clyde sait qu'il allait avoir mal. Il hausse les épaules, ne réagit pas à ce que dit Alma. Pourquoi faire? Il avait encore trouvé un moyen de la blesser, il l'avait senti au ton de sa voix. C'est toujours comme ça. Clyde se souvient pas d'une discussion qui aurait pas fini en éclats de voix. C'est intense. Peut-être trop passionnel. Tous ses sentiments gâchés. C'est bien dommage. D'autant plus que bientôt, il y aura un bébé au milieu de tout ça. Un petit garçon qui a besoin d'une famille. Faut dire qu'ils ont essayé, Alma et Clyde, d'être une famille. Mais ça part toujours en sucette. Clyde sent des doigts glisser sur son menton. Ceux d'Alma, évidemment. Il déglutit, forcé d'affronter son regard. Il n'arrive plus à baisser les yeux, son regard est fixé à celui d'Alma. Pas bien. Il se mord la lèvre inférieure, l'écoute le coeur serré. « Tu veux rentrer? » Clyde sait pas vraiment ce qui lui prend. Ou peut-être bien que si. Cette folie... Ça ne pouvait être que la preuve de son amour. C'est sûr, il lui en voulait. Non, il n'allait pas lui pardonner comme ça. De là à sortir de sa vie? Jamais. Il en serait jamais capable. Même s'ils sont déjà balancé des horreurs à la figure, même si ce sera pas tous les jours facile. Tant pis.

Peu à peu, elle perd pied, se laisse glisser. Elle fait tomber le masque en acier qu'elle s'est forgé durant toute ces années. Tout d'abord avec son père, qu'elle ne connaît ni d'Eve ni d'Adam. Un homme inconnu au bataillon qui ne connaîtra jamais son petit-fils. Elle aurait aimé savoir à quoi il ressemble, si ses traits sont similaires aux siens. Et puis il y a Jay, qui lui a toujours appris à se méfier de tout le monde, à ne faire confiance qu'à soi-même. Ensuite Ulysse, à qui elle a donné son coeur mais qui a préféré le jeter à la poubelle afin de s'abandonner entre les cuisses d'une blonde. Un coeur de glace bâti par des hommes retrouve sa forme originelle par un autre. Pas n'importe lequel. Malgré toute ces disputes, elle est fière Alma. Fière de son Clyde. Fière d'avoir été à ses côtés durant son évolution. Un gamin paumé devenu adulte. Les prunelles du brun rejoignent finalement ses jumelles. Elle peut rester un moment comme cela. Sans forcément parler. Juste le regarder, avec yeux d'amour. Alors ouais, elle fait tomber le masque. Son affection pour lui prend le dessus sur sa fierté. « Tu veux rentrer? » demande-t-il. Le visage de la Valhallens se radoucit. Serait-ce une preuve de pardon ? Peut-être. Du moins, il a fait un pas vers elle. Alors, le petit coeur de guimauve d'Alma fond un peu plus. Ses pieds la rapproche encore un peu plus de lui, sa tête se pose sur son épaule, ferme les yeux, un instant. Oh oui, elle sait qu'il lui en veut encore. Elle sait qu'il ne va pas oublier aussi rapidement. Elle veut juste une seconde chance. Lui prouver qu'elle est encore la fille de la balançoire. « j'veux que tu restes avec moi. j'te rappelle que je dois passer la nuit ici. » lance-t-elle, haussant les épaules. Ce n'est pas qu'elle ne veut pas retourner dans son appartement, mais elle n'a pas vraiment le choix. « mais à partir de demain, je te fais la promesse de ne plus te lâcher d'une semelle. » dit-elle, caressant doucement sa joue, avant de s'éloigner légèrement pour rejoindre son lit, fatiguée par cette énième dispute.

Clyde n'est pas sûr qu'il y ait de solution. A part peut-être s'abandonner totalement à ses sentiments. Ce qu'il fait au final. Et peut-être bien que la vie reprendrait son sens quand Alma sera à nouveau à ses côtés. Sûrement pas au tout début. Il y a des choses qu'ils ont chacun besoin de digérer. Mais plus tard, quand Clyde aura les esprits un peu plus clairs. Quand il aura trouvé le mec qui s'est tapé Alma dans son dos et qu'il lui aura tordu le cou. Certes le jeune homme a gagné en maturité mais il a toujours eu cette violence en lui. Taper pour rien, frapper quand ça fait trop mal. Et puis, on peut dire qu'il en va de l'honneur de sa famille cette fois. Le sien, celui du bébé à naitre... Et celui d'Alma. Fallait bien remettre les choses à leurs places. Alma appartient à Clyde. Et inversement. Il est temps que ça se sache. Clyde ne supporterait pas que quelqu'un touche à Alma une nouvelle fois. Il s'assurera que ça n'arrive plus. Quitte à faire tous ces trucs débiles qu'il ne s'était jamais vu faire avant. La tenir par la main dans la rue par exemple. Ou tout simplement la couver de ce regard si spécial, si tendre, qui lui est spécialement réservé. C'est dingue mais il avait presque hâte. Quand Alma vient poser sa tête sur l'épaule de Clyde, il pose instinctivement ses mains sur elle. Une dans ses cheveux, l'autre dans son dos. Il ne la serra pas. Il reste comme ça. Juste histoire de montrer qu'il est encore là. « J'imagine que je peux faire ça. » Un mince sourire, un air un peu triste. Comment ils avaient fait pour en arriver là déjà? Clyde sait même plus. Il regrette simplement, il aimerait se sentir autrement. « Très bien » dit-il en tournant la tête pour venir déposer un baiser dans le creux de la main d'Alma. Il la laisse ensuite s'éloigner et retourner dans son lit. Sûrement qu'elle avait besoin de repos. Lui aussi. Il ramène une des chaises de la pièce près du lit d'hôpital et pose sa tête sur un coin du matelas. Sa main vient à la rencontre du ventre bien bombé d'Alma. Clyde avait le droit à ses retrouvailles avec le bébé aussi. Bientôt, se rememora-t-il. Oh oui. Bientôt.

Finalement, malgré ce flot d'insultes et de mots dépassant la pensée, Alma n'arrive pas à lui en vouloir. C'est comme ça. Elle aimerait pourtant. Pouvoir lui faire comprendre à quel point elle lui en veux d'avoir fait ça comme lui a pu le faire. Ca devrait être facile. Mais apparemment, c'est plus difficile qu'elle le pensait. Quand elle le voit, près d'elle, elle a juste envie que tout redevienne comme avant. Qu'il la regarde tendrement plutôt qu'avec une certaine rancune. Qu'ils fassent l'amour plutôt qu'ils se fassent la guerre. Mais en sont-ils capables ? Pas sûr. Clyde et Alma, c'est trop passionnel pour qu'il n'y ait pas de zones de turbulences. Mais Alma est une pacifiste. Elle n'aime pas rester sur un conflit. Alors elle se glisse, doucement dans ses bras en espérant qu'il ne la repousse pas. Il ne le fait pas, ce qui la rassure légèrement. « J'imagine que je peux faire ça. » dit-il. Alors il se décide à rester, malgré ce qu'elle a pu faire. Elle est soulagée de ne pas se rester seule. La journée a été suffisamment difficile comme cela. Elle lui rend son sourire, pour le remercier. D'être là. D'être un père présent. « Très bien. » répond-il alors qu'il embrasse l'intérieur de sa main. Les gestes d'affection de Clyde lui ont manqué. Vraiment. Le fait ne pas toucher sa peau aussi. Alma se couche, bien trop épuisée par leur discussion. Clyde la suit de près, s'assoit sur une chaise auprès de son chevet. Sa main vint se loger sur son ventre, un sourire se dessine légèrement. « tu sens comme il bouge ? » demande-t-elle, alors que on regard se pose sur la main de Clyde. Elle pose la sienne sur cette dernière. « on va l'avoir, notre famille. » dit-elle.

Quand Clyde sent le bébé bouger dans le ventre d'Alma, il se surprend à être un peu jaloux. Il ne ressent pas tout ça lui. Il aura pas passé neuf mois aussi proche du bébé que l'est Alma. Il aura tout à apprendre de lui quand il pointera le bout de son nez. D'un côté, ça fait un peu peur. De l'autre, ça rend la surprise plus belle encore. Clyde imagine souvent ce bébé. Avec la tête d'Alma, pas la sienne. C'est pas qu'il veut pas que le bébé lui ressemble, c'est juste que ça parait trop surréaliste pour que ce soit le cas. Dans tous les cas, Clyde a déjà la conviction que le garçonnet sera beau. Ce sera même le plus beau des bébés. Parce que, ouais, Clyde est déjà gaga. Il hoche doucement la tête quand Alma lui demande s'il sent leur enfant bouger. C'est assez fascinant d'ailleurs. « Le pauvre, il doit s'ennuyer là-dedans... Doit pas y'avoir grand chose à faire. » Sourire en coin, Clyde cherche le regard d'Alma. Elle lui avait énormément manqué. Ça avait été qu'une question de jours... Et pourtant. Clyde veut plus jamais être seul. Alors quand Alma lui dit qu'ils allaient avoir leur famille, Clyde est soulagé. Enfin. Il a été trop longtemps tout seul dans sa vie. On peut pas dire que ce soit pas sa faute, il l'avait bien cherché. Là, ça allait être différent. Il serait là. Au final, sans Alma, Clyde serait encore au fond du trou. Peut-être même pire. « Tu regrettes? » Question un peu bête. Mais oui, Clyde s'interroge. Alma avait sûrement imaginé sa vie autrement. Il voulait juste savoir si ça lui convenait au moins autant que ce qu'elle avait espéré.