Ses yeux se baladent à travers la pièce, se posent sur les murs d'un blanc immaculé. Des posters, des photos, avec le même thème. Les bébés. Elle lâche un soupir. Alors ça allait être comme ça, maintenant. Un monde qui tourne uniquement autour des enfants, alors qu'elle en était elle-même encore une. Cruelle ironie, la gamine enfante. Ca ferait un bon titre dans un journal. Elle attends, tape du pied, seule dans la carré. Le tic tac de l'horloge lui tape sur le système, elle fait craquer ses doigts. Ouais, elle stresse. Toute ces crampes à en crever, c'est pas normal. Elle en hurle, elle en perd sa voix, elle en pleure. Ca ne peut pas être des contractions. La porte s'ouvre, elle se tient droit comme un i. Une femme, fin de trentaine, a sa crinière blonde retenue en arrière, et des lunette qui lui donnent un air sévère. Elle s'assoit, tient son dossier dans ses mains. Le coeur d'Alma tambourine dans sa cage thoracique et menace d'exploser à un moment ou à un autre. Les secondes s'égrainent difficilement. La femme plante finalement ses prunelles dans les siennes. « vos résultats sont normaux, votre bébé est en parfaite santé, mademoiselle valhallens. ces crampes doivent être dues à du stress à répétitions. il vous faut seulement un peu de repos. » lui dit-elle finalement. Sa poitrine se soulève, elle soupire, soulagée. Il va bien, ce gosse. Elle ne pensait pas être contente de dire ça, mais ouais, il va bien, et tant mieux. Elle sort, un poids en moins. Elle n'a qu'une seule envie : se retrouver face à la mer. Sa voiture la mène directement à la jeté, lieu qu'elle affectionne tout particulièrement. Elle y passe des heures, à refaire le monde, à tirer des plans sur la comète. Elle enlève ses chaussures, préfèrant le contact de ses pieds avec les rochers. Elle s'assoit, le vent percute son visage. Elle regarde les vague danser, songeant à l'avenir qu'elle pourrait avoir. C'est quitte ou double : ou elle s'en sort, ou elle plonge. Quoiqu'il arrive, ce sera avec cet enfant.

Je ne savais pas vraiment où j'allais pour tout dire. Par ici ou encore là, cela m'importait peu. La seule chose qui était certaine c'est que je n'avais pas envi de rester chez moi à rien faire. J'étais donc entré dans ma voiture était m'était mis à rouler encore et encore, sans vraiment pensé à m'arrêter. Lorsque l'endroit serait propice, je le ferais, je m'arrêterais. Mais pour le moment je tentais de me vider l'esprit de tout ce qui se passait dans ma vie. Pas que je me plaigne spécialement, cependant cela faisait du bien de remettre en question nos faits et gestes de temps en temps. De se mettre à penser que nous devrions plutôt agir comme-ci ou comme ça. Même si nous ne faisons pas nécessairement quelque chose pour modifier nos pensés. En revenant alors à moi même, je vu une voiture arrêtée juste devant moi. À peine ais-je eu le temps d'appuyer sur le freins. Je venais presque de foncer dans une autre voiture sans m'en rendre compte. Je n'avais pas été attentif et cela aurait pu causé un accident. Je me mis alors à trembler alors que je venais de décider le lieu où je me rendrais. La jeté, endroit de calme où la vue est à couper le souffle. Je pourrais y réfléchir calmement sans menacer la vie de quelqu'un. Mais pour le moment, je décidai de rester concentrer sur la route pour éviter de frapper une personne. Alors que le soleil tapait très fort sur ma voiture qui était noire, j'enfilai mes lunettes de soleil pour voir davantage. Et je continuai à rouler pendant une bonne dizaine de minutes avant d'arriver au lieu que je souhaitais rejoindre. Je pris alors une grand inspiration en fermant les yeux quelques instants pour me calmer quelque peu. J'étais tendu, pour aucune raison précise. J'étais stressé sans vraiment savoir pourquoi... Et étrangement, je me sentais différent d'une certaine manière. J'ouvris alors la portière, alors que tout l'air que j'avais pu respirer sorti de ma bouche. Je me suis alors senti vidé, mais mieux. En regardant devant moi je pus tout de suite voir la mer. L'eau bleu, qui donnait envi de plonger. Le ciel sans fin. C'était magnifique. J'adorais vraiment cet endroit, c'était paisible. Et puis J'aperçus alors une silhouette, seule. En m'approchant je pus distinguer que c'était une femme, et que je la connaissais. Je m'approchai alors encore un peu avant de venir m'asseoir à côté de celle-ci. Étrangement, j'étais resté en silence, ne ressentant pas nécessairement le besoin de parler, de dire ou encore d'avouer quelque chose. Ce silence est étrange à mes oreilles mais aucune désagréable. C'était différent. Mais devais-je rompre le silence ? Ou plutôt la laisser parler, elle ?

Les yeux plongés droit vers l'horizon, les mêmes questions reviennent encore et encore, tel un accord de guitare. Que va-t-elle faire ? Après tout, elle sort tout droit du monde de l'adolescence, vit aux crochets de maman dans sa petite maison confinée, dort encore avec un ours en peluche, fait des soirées pyjama avec ses copines. Une parfaite petite vie de lycéenne, sans ombre au tableau pour le moment. Un bébé a-t-il sa place au beau milieu de tout ça ? Il est clair que non. Va-t-elle réussir à gérer tout ça ? C'est quand même un sacré bouleversement, un mioche. Ça braille à gorge déployé et à tout va, a tout le temps faim et exige une attention particulière. Du haut de ses dix-huit ans, est-elle prête à tout ces sacrifices ? Arrêter ses études, faire face à sa mère, à ses amis qui la laisseront sûrement tomber, à trouver un job afin de pouvoir subvenir aux besoins de son enfant ? C'est difficilement acceptable. Alors pourquoi est-il encore là, au creux de son ventre ? Elle ne sait pas. Aussi difficile que ça puisse être imaginer, elle n'arrive pas à s'en débarrasser. Ca devrait être facile ouais, ce gosse est de la taille d'un petit pois. Pourtant, non, elle n'y arrive pas. Parce que dans le fond, c'est un bout d'elle qui grandit là. Et un bout de ce putain de connard de Clyde Wright. Et ça, ça la fait rager. Cet enfant, il ne mérite pas ça. Il ne mérite pas d'avoir un père comme lui. Un drogué, un coureur de jupons, un moins que rien. Ca par contre, elle a du mal à l'encaisser. Partager un bout d'elle avec lui lui donne la nausée. Elle ferme les yeux et se remémore cette fameuse soirée. De cette balançoire, de Clyde à ses côtés, de son étrange gentillesse, de ses bras autours d'elle, de ce baiser. De ses baisers. Okay, il l'a bien eu sur ce coup-là. En beauté même. Elle passa la main entre ses cheveux bruns, ouvre les yeux. Un homme a prit place à ses côtés. Elle tourne les yeux, le scrute. Rox. Un aussi beau visage ne s'oublie pas. Et puis, ils font presque partis de la même famille maintenant que sa soeur et Jay étaient ensemble. Un léger sourire se dessine sur ses lèvres. « la vue est magnifique. » dit-elle, repliant ses jambes vers elle. « je vois qu'on a eu la même idée. » continue-t-elle, plantant ses prunelles dans les siennes.

« La vue est magnifique. » Alors qu'elle mentionnait ses mots, je ne pus que me rendre à l'évidence. Elle avait raison. Que ce ne soit que ce bleu sans fin qui est d'une clarté époustouflante. On parle souvent de nos jours de toute la pollution des eaux, qui deviennent de plus en plus affreuse... Et pourtant quand je regarde cette vue j'ai l'impression que rien n'a changé, tout est comme quand j'étais plus jeune. Je me rappelle très bien alors que je venais ici avec ma petit sœur et ma meilleure amie, tous les trois accompagnés de la mère de cette dernière. Je me rappelle de ce temps, où tout était plus simple. Où je n'avais pas besoin d'ouvrir mes bouquins le soir, où je n'avais pas besoin de faire un truc qui ne me plaisait pas. Et quand j'y repensais sérieusement, j'avais l'impression que cela était loin, si loin. Ma vie avait changé, mais encore là c'était normal. Qu'est-ce qui ne changeait pas, très sérieusement ? Nous n'avions que nos souvenir qui pouvaient surgir d'un moment à l'autre nous transportant dans une étrange nostalgie qui est parfois non désirée. J'aurais voulu resté ce que j'avais toujours été, un mec qui ne fait rien de sa vie, autre que sortir avec ses copains, rencontrer des meufs de temps en temps... Une vie parfaite en gros. Non, je n'étais pas vraiment bien placé pour parler je le savais très bien. Alors que certaine personne n'ont rien à manger, n'ont pas de vêtements, ni d'argents, moi qu'est-ce que je n'ai pas ? Une copine ? Non, mais c'est très niais face à leur situation. Et à bien y penser, je me sens ridicule. « Si le paradis devrait ressembler à un lieu, c'est bien à celui-ci qu'il ressemblerait... » Unique était bien un mot désigné pour parler de la jetée principale de San Diego. Tu as beau cherché pendant des heures et des heures sur Google, jamais il est possible de voir cela comme ça, ailleurs qu'ici. C'est ainsi. « Je vois qu'on a eu la même idée. » Je me retournai alors pour la regarder de face. Un sourire se dessina sur mes lèvres alors que ses yeux fixaient les miens. « En effet... Alors, qu'est-ce qui t'a poussé à venir ici ? » Je retournai mon regard vers l'océan avant de poursuivre. « Je demande, parce que la plus part du temps, quand je viens ici c'est pour me changer les idées... Je me dis que je dois pas être le seul. » Ou peut-être qu'en fait, oui j'étais le seul.

« Si le paradis devrait ressembler à un lieu, c'est bien à celui-ci qu'il ressemblerait... » lance-t-il alors, ses yeux balayant l'horizon. Un sourire étire ses lèvres. Rox a toujours le don pour magner les mots. Et il a raison. Ses prunelles se perdent de nouveau sur ce paysage féérique et elle inspire profondément. Elle est à une période chaotique de sa vie et pourtant se sent incroyablement bien. Sacré paradoxe. Ici, elle se sent apaisée, c'est peut-être le pourquoi du comment. « et tu serais sûrement l'un de leur plus bel ange. » répond-t-elle, se basculant pour taper dans son épaule et un léger rire s'échappant de ses lèvres. Ce n'est aucune une tactique de drague. Alma n'est pas à l'aise avec quelconque forme de rapprochement avec les hommes et elle part du principe que le feeling fait le tout. Et puis Rox, c'est le frère de Rouky, la petite amie de son frère. Ils sont comme demi-frères et soeurs quoi. « En effet... Alors, qu'est-ce qui t'a poussé à venir ici ? » demande-t-il. Alma s'immobilise soudainement, redoutant cette question, bien qu'elle s'attendait à ce qu'il l'a pose à un moment ou à un autre. « Je demande, parce que la plus part du temps, quand je viens ici c'est pour me changer les idées... Je me dis que je dois pas être le seul. » précise-t-il. Bien sûr qu'elle est ici pour se changer les idées. Pour remettre de l'ordre dans ce bordel qu'est sa vie, aussi. Elle attrape ses genoux, se bascule légèrement d'avant en arrière, comme pour se donner du courage. Allez Alma, lance-toi, cela va finir par se voir de toute façon. C'est plus facile à dire qu'à faire. « je... » débute-t-elle, sans arriver à sortir le moindre mot. Pourtant, c'est Rox, il ne va pas la juger. Elle inspire de nouveau, ferme les yeux, et les mots sortent tout seul. « je suis enceinte. de clyde. » balance-t-elle, comme on jette un fardeau à la mer. C'est à la fois un soulagement et une torture de dire cette vérité qui la ronge de l'intérieur. « et puis tu le connais, il m'a traité comme la dernière des traînés et il me supplie d'avorter. dit-elle, sentant sa gorge se nouer. mais je ne veux pas. je ne veux pas tuer mon bébé. » avoue-t-elle, les yeux brillant de désespoir. Elle jette une bouteille à la mer et veut que quelqu'un l'aide.

Un petit sourire se dessine sur le coin de mes lèvres suite à son commentaire. Peut-être parce que je ne serais jamais réellement un ange, à vrai dire. Je suis même convaincu que je ferais plutôt parti des disciples de Satan. Elle, par contre, c'était un ange. Et elle ne pouvait le nier ça c'était sur. « Tu peux bien parler, toi. » Je me mis à rire un peu avec elle, alors que je répondais à sa poussé. Elle était amusante la petite, ça c'était évident. Je regardai avec plus d'intensité l'étendu d'eau qui se présentait ainsi à moi et je pris une grande inspiration. Et je l'écoutai, alors qu'elle m'avoua it qu'elle était enceinte... Sur le coup je ne savais pas vraiment quoi dire. Enfin, je ne pouvais rien faire. Mais je me doutais bien que ça ne devait pas être facile pour elle. Non, en fait, j'en savais absolument rien, je n'étais pas dans sa tête, je n'en savais trop rien. Je passai alors un bras autour de ses épaules en la serrant un peu contre moi. Habituellement, je savais toujours quoi dire et pourtant là, j'avais l'impression qu'aucun mot n'était approprié. Devais-je lui dire que tout allait bien aller ? Après tout je n'en savais rien moi, je n'étais pas voyant... Tu fais bien d'en faire qu'à ta tête, Alma. » Après tout c'est elle qui allait le porté durant tout ce temps, le bébé. Et sûrement elle qui allait s'en occupé. « Enfin, je suis sûr que tu vas être une mère sensationnelle, petite. » En même temps, si on parle d'Alma, elle est fantastique, alors pourquoi ne le serait-elle pas en tant que mère ? « J'espère que tu ne l'as pas cru quand il t'a traité de traîné, au moins ? » Je le comprenais pas, Clyde. De dire ça d'elle. Enfin, il avait dû le dire en colère, espérons qu'il ne le pensait pas. Je lui lançai un petit sourire pour l'encourager, avant de me lever d'un seul coup. Je lui tends alors la main pour l'aider à se relever aussi. « On marche un peu ? » Ce n'était pas vraiment une option en fait... « Ah moins que tu te sentes pas capable ? » Ok, elle était pas cool celle-là, enfin je ne faisais que la taquinée un peu, histoire de la détendre. Je lui fais une petit grimace avant de commencer à marcher.