Quatre mois et demi. Quatre mois et demi qu'elle doit cohabiter avec un petit homme qui grandit de jours après jours. Son corps se tord face à ce nouvel imprévu, ses courbes changeant constamment. Parfois, il lui arrive de s'arrêter devant un miroir pour observer ce ventre rond, ses seins gonflés, ses joues légèrement remplumées. Tantôt elle se dégoûte, tantôt elle trouve cela magnifique. Tantôt elle veut passer sous un train pour ne pas voir ce qui s'apprête à être le plus grand changement dans sa vie d'adulte, tantôt elle n'a qu'une hâte : pouvoir serrer son corps frêle dans ses bras. Elle ne peut plus faire machine arrière. Dans cinq mois et demi, un bébé dépendra d'elle, et ce pour toute sa vie. Elle s'en retourne le coeur. Et si elle n'arrive pas à s'en occuper correctement ? Et si son éducation laisse à désirer ? Et s'il n'est tout simplement pas heureux ? Et si, et si... stop. Garde les pieds sur terre Alma, tu peux le faire.  Aujourd'hui, il est presque impossible de cacher sa grossesse. Son ventre s'est arrondi comme n'importe quelle nouvelle mère. Même ses vêtements ne peuvent plus lui servir de parade et elle est par ailleurs étonnée que la nouvelle ne soit pas arrivée jusqu'aux oreilles de la matriarche Valhallens. Alors Alma passe son temps chez Swendylina, histoire de repousser la révélation le plus tard possible. Pourtant, aujourd'hui elle reçoit un message de sa mère. Elle veut la voir. Son cœur bat à rompre. Elle n'a pas le choix, elle va s'y rendre et lui dire la vérité; la mascarade a assez duré. Elle passe la porte, voit sa mère seule, au bout de la table de la cuisine. Elle déglutit difficilement, avance à sa hauteur doucement. Elle tient un papier dans ses mains. Elle ne relève même pas les yeux, se contente de faire glisser le document. Elle l'observe, ferme les yeux. Elle est au courant. Une larme, deux larmes coulent sans pouvoir se contrôler. Alma tente de lui expliquer, elle ne veut rien entendre. Des silences, des éclats de voix, des larmes, une valise posée sur le pas de la porte. Une phrase retient son attention : tu n'es plus ma fille, fiche le camp. Elle sent son coeur se briser en mille morceaux, chaque parties partant dans tout les sens. Sa vision brouillée, elle sait qu'elle a perdu la bataille, elle se résigne et empoigne sa valise et quitte définitivement le domicile familiale. Elle marche, sans savoir vraiment où aller. Oh bien sûr, elle en a, des amis. Mais reste à savoir si ils sont prêts à s'embarquer dans une aventure comme celle-là. Le froid règne, le vent claque et fait tanguer ses cheveux. Petite fille paumée en tête-à-tête avec son bagage. Les gens la dévisagent, se demande ce qu'elle peut bien faire dans la rue à une heure pareille. Elle tourne, se retrouvent face à une porte. Elle pousse cette dernière et s'engouffre dans l'immeuble. Une seconde porte. Elle reste immobile, est tentée de partir, puis se ravise. Elle souffle et sonne, essuyant d'un revers de la main ses yeux rougit par les larmes. Elle est pathétique. Son maquillage coule, ses cheveux décoiffés par le vent, son gros bide dégueulasse. Mais Clyde, il doit s'en foutre à cette heure-là, il doit être défoncé, le nez pleins de poudre, du whisky coulant dans ses veines. Elle prie juste pour qu'il soit chez lui et qu'il accepte de l'héberger, juste cette nuit.

Depuis que Clyde a accepté de devenir père, il a constamment une boule dans le ventre. Quelque chose qui le gêne, l'inquiète. Il passe ses journées à se demander si ça allait aller. Il était loin de se sentir à la hauteur malgré tous les efforts qu'ils allaient faire. Ou qu'ils avaient déjà fait. Il s'est adouci Clyde, il est plus gentil. Un peu moins nombriliste. Comme s'il venait tout juste de se rendre compte qu'il n'était pas tout seul sur terre. Faut pas croire, il est pas en train de changer du tout au tout. Clyde est Clyde et le restera. Pas de remède miracle. Seulement des progrès. Alors qu'il avait pour habitude se retourner la tête chaque soir à l'extérieur, Clyde est devenu plus casanier. Il se retourne la tête tout seul chez lui, c'est bien aussi. Plus sûr aussi, il veut pas déraper. Y'a quelqu'un qui compte sur lui et, cette fois, Clyde ne peut pas lui tourner le dos. Il a promis. Une promesse, ça avait toujours été que des mots pour lui. Là, c'est différent. Il voulait y arriver. Il y a trop en jeu pour qu'il gâche tout. Mais ça le stresse, le ronge de l'intérieur. Il a constamment peur d'échouer, de se priver de quelque chose et d'en pâtir pour le reste de sa vie. Alors il s'échappe. Un joint, peut-être deux. Quelques rails, une gorgée de whisky. Il est ailleurs. Il profite du silence de son appart, du répit que lui accorde sa tête. Il pense à rien, c'est le vide dans sa tête. C'est tellement jouissif. Allongé dans son canapé, bras et jambes écartés. Une sensation de flottement, l'impression de voler. C'est tellement agréable que Clyde ferme les yeux. Le temps passe. Des minutes, peut-être même des heures. Clyde a perdu la notion du temps. Il fait nuit, c'est tout ce qu'il sait. Ça lui importe pas grand chose. Il travaille même pas demain, c'est pour dire. Foutu boulot d'ailleurs. Dans un élan de lucidité l'autre jour, Clyde avait pensé à faire une formation quelque part pour trouver un vrai métier. C'était vite retombé. Comme toutes les bonnes idées qu'il a. Ça finit toujours aux oubliettes, c'est comme s'il ne gardait que les mauvaises. Finalement, il bouge un peu. Une clope qu'il fume en un temps record puis une deuxième qu'il met un peu plus de temps à savourer. Clyde met un moment avant de comprendre que ça sonne. Il soupire, c'est pas comme s'il l'attendait quelqu'un. Encore moins en pleine nuit. Encore une bouffée de cigarette et il parvient à se hisser sur ses deux jambes pour ouvrir la porte d'entrée de son appartement. Il tombe sur Alma. Une triste Alma. Elle a les yeux rouges, une tête à rendre jaloux un zombie. Clyde comprend tout de suite. Il lui adresse un sourire désolé, ouvre grand la porte pour qu'elle entre. C'est le bordel mais vu les circonstances, ça devrait pas trop la gêner. Pendant plusieurs secondes, Clyde ne sait absolument pas quoi faire. Il referme la porte, cherche quelque chose à dire. Rien. Le néant. Il savait que ça allait arriver, il n'avait juste jamais réfléchit à ce qu'il ferait. Plus naturellement que prévu, il vient prendre Alma dans ses bras. Il fait reposer sa petit tête contre son torse, sent le ventre arrondi d'Alma contre lui. Il tangue. A moins qu'il soit en train d'essayer de la bercer. S'il avait su, il aurait fait en sorte d'être un peu moins minable. Il avait pas anticipé, comme toujours. N'empêche qu'il fait des efforts pour se concentrer, pour ne pas agir comme le pire des junkies. Clyde s'écarte doucement d'Alma, caresse délicatement sa joue en essuyant quelques traces de mascara. Il sourit. « Qu'est-ce que t'es belle ce soir! T'as fait tout ça pour moi? » L'humour. C'est comme ça que Clyde avait toujours fait face. Il ne cherchait pourtant pas à éviter le problème cette fois. Il voulait juste détendre l'atmosphère, consoler la mère de son enfant.

Les minutes passent. Pas un seul bruit ni de silhouette à l'horizon. Elle se tortille, se mouve, telle une enfant. Elle prend son mal en patience, ses mains triturent la poignée de sa valise. Ils doivent bien rire, les voisins, les petites commères qui la scrutent derrière leur porte. Ils la prennent sûrement pour une des conquêtes de Clyde qui pensent avoir trouvé l'homme de sa vie en une demi-heure top chrono sous les draps. C'est loin d'être le cas. Un énième soupir. Le jeune homme est aux abonnés absents. Il doit sûrement être en train de se retourner le crâne dans une rave ou être en pleine drague intensive auprès d'une blonde qui rigole à ses blagues même pas drôles dans un bar. Elle lève les yeux au ciel, repousse ses mèches folles. C'est une erreur d'être venue ici. Alma chérie, tu pensais vraiment que Clyde allait attendre gentiment ta venue dans son petit appartement ? Idiote va. Elle empoigne fermement sa poignée de valise, s'apprête à partir. Un bruit de serrure la stoppa dans son action. Elle s'immobilise. Manquerait plus qu'elle tombe sur une de ses one-shot à moitié à poil et elle pourra dire qu'elle a gagner sa valise. La porte s'ouvre, elle la fixe. Clyde. Il est là. L'espace d'un instant, sa conscience est soulagée. Il a l'air seul. Du moins, elle l'espère. Leurs regards se croisent l'espace d'un instant. Un léger sourire se dessine légèrement sur les lèvres de son ex-amant. Il a compris. Il ne faut pas être sorti de Saint-Cyr pour le comprendre. Alma n'a pas choisi d'être foutu à la porte par sa mère. Un silence de mort, comme s'il avait également comprit qu'elle ne veut pas s'étaler sur le sujet. Elle entre, dépose sa valise dans un coin. Clyde l'attire contre lui et l'encercle de ses bras. Instinctivement, elle déposa sa tête contre son tronc, ferme les yeux et se laisse aller. Elle ne compte plus le nombre de larmes qui coulent, ni ô combien sa voix se saccade. Son monde tout entier vient de s'écrouler. Et cela fait du bien d'avoir quelqu'un sur qui se reposer l'espace d'un instant. Il se décale, essuie le visage de la jeune Valhallens. « Qu'est-ce que t'es belle ce soir! T'as fait tout ça pour moi? » s'exclame-t-il. Elle lâche un léger rire, puis renifle comme un mioche. Pas très élégant certes, mais au point où elle en est, cela l'importe peu. « je savais que tu avais un faible pour les causes perdues, alors j'me suis dit pourquoi pas... » répond-elle, haussant les épaules. Elle croise les bras au-dessus de son ventre, pose son regard sur le jeune homme. « promis, je n'empièterais pas longtemps dans ton espace vital. juste une nuit, après je me débrouillerais. j'irais chez mon frère, sûrement. » lance-t-elle.

Elle pleure. C'est bizarre mais Clyde se sent affecté. Un pincement au coeur, il aurait préféré que ça n'arrive jamais. Ses épaules deviennent lourdes, la culpabilité sûrement. Il pose son regard sur Alma, s'attarde. Elle est belle Alma. Même quand elle devrait être moche. N'importe quelle autre fille le serait, Clyde la dégagerait d'ailleurs. Pas Alma. Pourtant, il est pas du genre gros nounours. Il a qu'à regarder le petit ventre d'Alma, signe manifeste de sa grossesse, pour qu'il ait envie qu'elle reste. Oui, envie. C'est sûr que ça tombe un peu mal, il est complètement stone. Il risque sûrement de dire des conneries, peut-être même de dépasser encore une fois les bornes. Tant pis. Il la fera rester quand même. Enfin, c'est elle qui vient pour rester. Il rigole doucement, lâche finalement la joue d'Alma. Il a du mal à garder les yeux ouverts et se rend compte que c'est peut-être à cause du fait que son appartement est un véritable fumoir. Presque raisonnable, Clyde va ouvrir une des fenêtres. Y'a un bébé dans le ventre d'Alma, un gosse qui a pas besoin de respirer tout ça. Clyde est con mais pas assez pour ignorer quelque chose d'aussi basique. « T'es pas sensé te débrouiller Alma... Je dois être là. » Il grimace. Les mots étaient sortis naturellement. Dans son état normal, Clyde n'aurait certainement pas été capable de dire un truc pareil. « Et j'ai pas franchement envie de mêler plus ton frère à tout ça... Je sais pas si tu te rappelles mais il en a mis plein la gueule quand il l'a appris. » Clyde esquisse un timide sourire avant de s'installer sur son canapé. De la main, il invite Alma à faire de même. Il ferme les yeux, il a sacrément mal à la tête d'un coup. Clyde passe une main sur ses tempes, essaye de se focaliser sur le moment présent et pas sur son envie de faire n'importe quoi. C'est important qu'il se répète intérieurement, c'est important. « Moi je vais dormir sur le canapé, je te laisserais ma chambre. Ça pue un peu le fennec là-bas mais c'était le risque en débarquant ici... » Un sourire se dessine sur le visage de Clyde suivi de près par un rire. Depuis qu'il s'est barré de chez sa mère, Clyde a toujours vécu seul. Pas de coloc, il est trop insupportable pour ça. Encore moins de gonzesse, il les garde jamais longtemps. Il appréhendait un peu la colocation avec Alma même si c'était que pour une nuit comme elle le disait. Effectivement, elle était sur son territoire et Clyde ne pouvait guère dire que ça le rassurait.

« T'es pas sensé te débrouiller Alma... Je dois être là. Et j'ai pas franchement envie de mêler plus ton frère à tout ça... Je sais pas si tu te rappelles mais il en a mis plein la gueule quand il l'a appris. » qu'il dit, avec ses yeux rougit pas les merdes qu'il prend. Déphasé, défoncé, stone, out, arraché, camé. Tout ces synonymes reviennent au même : Clyde est un putain de toxico. Un beau et attendrissant toxico. Elle reste debout, à la regarder un moment. Le pense-t-il vraiment ou sont-ce les multiples drogues qu'il s'est injectée qui parle pour lui ? Sûrement les deux. Elle s'assoit à ses côté, se tourne vers lui, qui a les yeux clos. Elle lâche un léger rire suite à sa remarque. « je me rappelle de la dernière fois où je t’ai vu. tu  avais un coquard là. et là. ça t'allais plutôt bien. et puis c'était largement mérité. » avoue-elle, frôlant les parties de son visage en question du bout de ses doigts. Il est vrai que Jay avait fait de sacré dégâts ce soir-là. Elle ne peut s'empêcher de penser que ceci est de sa faute, m'enfin, c'est du passé. « mais tu devrais me remercier. l'effet bad-boy a dû avoir de l'effet sur la gentil féminine. » continue-t-elle, un léger sourire sur ses lèvres. Elle voit d'ici le flot de nanas qui ont sûrement voulu prendre soin de lui, le tout grâce à elle ainsi qu'aux mains expertes de son frère. Les Valhallens faisaient une sacré team à eux deux. « ma mère m'a dit mots pour mots qu'elle avait honte d'avoir une fille comme moi et que pour elle, je n'existais plus. j'ai plus de famille Clyde, à part Jay. Alors je sais qu'il n'est pas ravi d'être tonton, ni d'avoir quelconques liens de parenté avec toi, mais il va falloir qu'il accepte que tu sois le père de cet enfant. et il le fera. » lance-t-elle, d'un ton plutôt déterminée. Ou pas. Clyde, il a l'habitude d'être coupé de sa famille, de vivre tout seul. Mais Alma ne peut pas rester comme ça, sans toute ces parties de son coeur. « pourquoi on a fait ça, ce soir-là ? pourtant on savait que c'était mal. regarde où ça nous mène. on est là, comme deux cons... dans le fond, t'avais raison. j'aurais dû avorter. et j'y pense encore, aujourd'hui. qu'elle dit alors qu'elle fixe son ventre. tu trouves ça normal, à dix-huit ans, de ressembler à une baleine échouée ? » s'exclame-t-elle, lâchant un soupir.

S'il l'avait mérité? Sûrement. A la place de Jay, Clyde n'aurait jamais pu s'arrêter de taper. Il l'aurait tué et aurait fini en prison. Après avoir fait avorter sa petite soeur bien sûr. Mais ce n'était pas qu'une simple question de confiance. L'arrogant Clyde avait provoqué Jay, certainement qu'il avait envie de se faire taper. Jay l'avait pas loupé, Clyde en garde encore de douloureux souvenirs. Mais il sourit quand même, rigole même alors qu'Alma parcourt du bout des doigts son visage. « C'est vrai, j'étais sacrément beau-gosse! » Ça, il le pensait pas vraiment. Il s'était fait peur dans le miroir le lendemain. C'était devenu bleu ensuite violet pour finir jaune. Enfin, franchement, c'était dégueulasse quoi. Heureusement, Clyde avait retrouvé sa peau d'albâtre depuis. « Ouais. J'en ai raconté des histoires farfelues! J'ai jamais dit que c'était parce que j'avais engrossé la petite soeur d'un de mes potes. C'marrant hein, j'avais comme l'impression que l'effet futur père n'allait pas faire autant mouche... » Un léger rire. Clyde se redresse ensuite quand la conversation devient un peu plus sérieuse. Il hoche vaguement la tête, se pince les lèvres. Que d'efforts! « Laisse-lui le temps alors. T'es pas obligé d'aller le narguer maintenant. Enfin, je te fous pas dehors quoi. » Clyde se met à inspecter le plafond, il arrive pas à croire qu'il arrive à parler aussi aisément. Ça part dans tous les sens, Clyde s'étale de partout. Alma se met à se lamenter, Clyde réprime un rire qu'il remplace pas un sourire amusé. Il attrape Alma, la prend contre lui. Pauvre enfant. Elle avait assuré jusque-là. C'était à Clyde de montrer de quoi il était capable. « Tu as fait ça parce que t'étais triste. J'ai fait ça parce que... Parce que tu t'es vu?! T'étais trop tentante. Bref. Peu importe. On y est. Tous les trois. Je sais que je t'ai pas trop donné des raisons d'y croire mais ça va le faire. Tu vas pas avorter. » Clyde repose le regard sur Alma. Incroyable mais vrai, c'était lui qui ne voulait plus qu'elle avorte maintenant. Il y a de cela plusieurs jours, il se serait précipité à la clinique avec Alma dans les bras. Radical. Clyde vient passer les doigts dans les cheveux d'Alma, joue avec du bout des doigts, les caresse. Il sait pas trop ce qu'il fait mais c'est pas désagréable. « Je vois pas de baleine échouée moi. Juste le petit bout de femme qui porte mon enfant... Je te trouve chouette comme ça. » Il sourit, déplace son regard dans le vide.

Étrange situation. Clyde et Alma qui se parlent comme deux amis de toujours. Quand on se dit que quelques mois auparavant, ils se crachaient des noms d'oiseaux à la figure, c'est quand même sacrément drôle. Alma joint son rire au sien. « C'est vrai, j'étais sacrément beau-gosse! » s'exclame-t-il. Elle rigole de plus belle. Ca lui fait du mal, de se changer les idées, à la brune. « ça te donnais un p'tit air de johnny depp. ou de max la menace, au choix. » s'amuse-t-elle à dire. Elle le taquine dans ses malheurs, bien que dans le fond, il les avait bien cherché. Balancer du tac-o-tac n'avait pas été très judicieux de sa part. Mais bon, c'est Clyde hein, il ne fallait pas s'attendre à beaucoup mieux. « Ouais. J'en ai raconté des histoires farfelues! J'ai jamais dit que c'était parce que j'avais engrossé la petite soeur d'un de mes potes. C'marrant hein, j'avais comme l'impression que l'effet futur père n'allait pas faire autant mouche... » avoue-t-il. Bon c'est quand même bizarre de parler de ça entre eux. Ils vont quand même devenir parents, et lui, il parle de ses conquêtes. Normal. M'enfin, elle ne lui en tient pas rigueur. « ne sous-estime pas la force d'un père de famille. ils sont quand même sacrément sexy avec leur bébé dans les bras. j'suis sûre que tu ferais un malheur dans les parcs ! » rétorque-t-elle. Oh ouais, c'est sacrément sexy un mec avec une poussette. Ou pas. Enfin, sauf si tu veux attirer dans tes filets une femme de plus de trente ans. Et puis elle est là, avachie sur le canapé, telle une grosse loque, à se lamenter. Elle fait pitié, la petite Alma. Elle se plains, veut une vie différente. Le regard dans le vide, elle déballe son monologue qui donne envie de se tirer une balle. Elle aurait dû l'écouter, Clyde. Partir du lycée le jour où elle a découvert qu'elle était enceinte et aller directement à la clinique pour tuer cette boule de chair. Mais Alma a une conscience, et elle n'a pas pu. Résultat des courses, elle se retrouve sans famille et avec huit kilos de plus. Génial. Un fois de plus, Clyde l'attire vers lui pour la prendre dans ses bras. Elle esquisse un sourire. « Tu as fait ça parce que t'étais triste. J'ai fait ça parce que... Parce que tu t'es vu?! T'étais trop tentante. Bref. Peu importe. On y est. Tous les trois. Je sais que je t'ai pas trop donné des raisons d'y croire mais ça va le faire. Tu vas pas avorter » le rassura-t-elle. Elle reste silencieuse. C'est sans doute la première fois qu'il lui sort un discours aussi mature. Elle ne sait pas si c'est rassurant ou non. Ouais, ça devrait l'être. Elle sent ses doigts dans sa chevelure, elle s'autorise à poser sa tête contre son épaule. « Je vois pas de baleine échouée moi. Juste le petit bout de femme qui porte mon enfant... Je te trouve chouette comme ça. » finit-il par dire. Elle se mort la lèvre, c'est tellement mignon. Trop mignon. Pas normal. Enfin, venant de lui. Elle se retient un moment, avant de finalement lâcher le morceau. « qui porte ton fils. rectifie-t-elle, relevant la tête en sa direction. on va avoir un petit garçon. » lâche-t-elle, accompagné d'un petit rire, et haussant les épaules. Elle voulait attendre un peu avant de lui dire, mais elle lui doit bien la vérité après tout.

Finalement, faut croire qu'ils avaient réussi à s'entendre. Ça devrait être perturbant pour lui mais Clyde vit la situation avec un naturel déconcertant. Il a l'impression de la connaitre depuis longtemps Alma. C'est pas vraiment le cas. Avant ce fameux soir, il n'avait fait que la contempler, la traiter comme la gamine qu'elle était alors à ses yeux. Au bout du compte, elle est bien plus que ça. « Max la menace? Ah non, je prends Johnny Depp, il est sexy lui. Enfin pas plus que moi mais bon... » Riant aux éclats, Clyde hausse les épaules. La conversation est légère. C'est pas plus mal parce que Clyde est léger aussi, il plane carrément. Nouvel haussement d'épaules. « Ouais, t'as peut-être raison! Par contre, toi, c'est pas dit que t'aies le même succès...  M'enfin, si ça te démange, je serai là hein. » Plus fort que lui, fallait qu'il revienne à l'attaque. On mettra sur le compte de ce qu'il a dans le sang. Ou pas. Clyde saute sur tout ce qui bouge, c'est pas vraiment nouveau. Emporté par une douce torpeur, Clyde manque de s'endormir. S'il ne bougeait pas dans les secondes qui suivent, il arriverait plus à le faire avant le lendemain matin. Trop raide. Mais il est réveillé par l'annonce d'Alma, sursaute même. Il sait pas trop pourquoi ça lui fait cet effet-là mais il se lève d'un bond et prend Alma dans ses bras pour la faire tournoyer à travers la pièce. Il rigole, normal, il est défoncé. Sauf que la nouvelle lui fait réellement plaisir. Finalement, il repose Alma sur le sol, tient sa tête qui se met à tourner toute seule. « Tu peux pas savoir le soulagement que c'est! J'aurais pas besoin de m'inquiéter tout le temps qu'un mec s'approche de lui, j'aurais pas besoin de gérer ses premières règles, ni le couvent... Pas de longs cheveux à brosser... Ah mais quel bonheur! » Clyde se marre. La vérité, celle qu'il n'avouera jamais, c'est que ça lui rappellera sa vie de famille d'antan. Ses propres petits frères, ses bébés à lui. Il titube dans la pièce, attrape son paquet de clopes et se ravise au dernier moment. A la place, il va se chercher quelque chose à boire. Il touche pas à la bouteille de whisky sur la table basse, se dirige vers le frigo. « Pour fêter le fait que tu vas enfanter un parfait petit garçon, tu veux boire quelque chose? J'dois avoir des sirops quelque part... » Ça, c'était même pas sûr. Clyde ne faisait que supposer. Niveau alimentaire, Clyde était souvent très démuni.  

« Max la menace? Ah non, je prends Johnny Depp, il est sexy lui. Enfin pas plus que moi mais bon... » lance-t-il. Alma roule des yeux. Clyde et sa confiance en lui. Bon, okay, ça a un côté sexy, mais bon, faut pas exagérer non plus. Et Johnny Depp, ça reste Johnny Depp. Même s'il peut être son père, elle en ferait bien son quatre heure. « Tu peux provoquer des orgasmes rien qu'en criant son nom. le jour où c'est ton cas, appelle-moi. » rétorque-t-elle, arquant un sourcil. Par la suite, un léger rire se dégage de ses lèvres. Clyde et son sex-appeal, c'est toute une histoire. Finalement, elle ne comprend pas toute cette attraction autour de lui. Okay, il est canon, mais elle le voit d'ici en train de sortir des répliques à deux balles pour foutre une gonzesse dans son lit. Pathétique. Mais elle n'allait pas lui dire au risque de rentrer en conflit. C'est pas le but. « Ouais, t'as peut-être raison! Par contre, toi, c'est pas dit que t'aies le même succès... M'enfin, si ça te démange, je serai là hein. » balance-t-il. Elle hoquète de surprise. Elle lance son coude dans ses côtes. C'est pas le culot qui l'étouffe, cet abruti. « Eh ! j'te signale que je ne serais pas dans cet état-là si je n'étais pas canon. constate-t-elle, et puis il faut pas croire hein, j'en ais eu, des propositions. c'est juste qu'en ce moment, ça me paraît peu approprié. » dit-elle, croisant les jambes. Sa vie va changer dans quelques mois, elle ne se voit donc pas s'engager dans une nouvelle relation. Sa vie est assez un gros bordel pour inclure un nouveau protagoniste dedans. Un calme plat, une révélation de taille. Elle se retrouve soulevée du sol sans savoir pourquoi. Elle tourbillonne, encore et encore. Elle lâche un rire, tapote le dos de Clyde. « arrête, tu m'donnes la nausée ! » s"exclame-t-elle, alors qu'elle retrouve enfin la terre ferme. « Tu peux pas savoir le soulagement que c'est! J'aurais pas besoin de m'inquiéter tout le temps qu'un mec s'approche de lui, j'aurais pas besoin de gérer ses premières règles, ni le couvent... Pas de longs cheveux à brosser... Ah mais quel bonheur! » lance-t-il. Une petite moue sur son visage. Alma, elle s'en fou que ce soit une fille ou un garçon, tant qu'il est en bonne santé. Le destin a fait que ce soit un petit homme, si cela fait plaisir à Clyde, tant mieux. Cela veut dire que si c'était une fille, il aurait fait la gueule ? Mmmh, peut-être. Elle n'a pas à l'envisager. Elle l'observe, il tangue, n'est pas dans son état normal. Du Clyde dans toute sa splendeur. Ses mains se placent sous son ventre, elle reste silencieuse. « Pour fêter le fait que tu vas enfanter un parfait petit garçon, tu veux boire quelque chose? J'dois avoir des sirops quelque part... » demande-t-il. Il lui fait dos, elle roule des yeux. Elle n'aime pas ça. Et si elle a besoin de lui un jour et qu'il débarque complètement camé ? Finalement, elle ne peut pas lui donner sa total confiance. Ça en est presque effrayant. Elle secoue la tête. « je... non, merci. répond-elle. j'vais sûrement aller me coucher. j'ai un peu mal à la tête, et puis... tu as peut-être mieux à faire.» déclare-t-elle, posant son index sur la table pour attraper la poudre blanche, avant de souffler dessus.

« C'est peut-être pas mon cas mais en attendant t'as couché avec Clyde Wright, pas Johnny Depp! » Comme c'est délicat de la part de ce cher Clyde qui se met à rire comme un bossu! Il se rend même pas compte d'à quel point il peut être exaspérant. Il a tellement l'habitude de jouer. Surtout avec son image. Il se prend un violent coup dans les cotes, il arrête carrément de rire pour le coup. Il se tourne vers Alma. Nan mais elle est folle ou quoi? Il voulait simplement lui rendre service, c'est pas comme si! Il écarquille les yeux, réagit pas forcément plus que ça. Les femmes sont folles, il va pas chercher à comprendre. « Mais t'es canon Alma. Je connais juste pas grand monde qui ait envie de se taper une maman mineure. Bon, y'a moi, c'est sûr... Mais ça doit être tout. » Regard en coin, Clyde cherche à savoir s'il allait encore se prendre un coup bien placé. Et puis il se rend compte qu'il doit pas être du tout en train de l'aider à se sentir mieux et il culpabilise. Il s'était fait une priorité de la ménager et finalement il la descendait. Encore des conneries. Heureusement, ils embrayent sur quelque chose de plus joyeux et Clyde propose même à Alma de trinquer. Il est un peu déçu quand elle le remballe, il comprend pas trop ce qu'elle fait, encore moins ce qu'elle veut. Alors qu'il croyait que ça allait bien, il avait l'impression de faire un bond en arrière. Il la suit du regard, l'observe silencieusement alors qu'elle s'approche de sa poudre chérie. Clyde comprend d'un coup mieux le changement d'humeur, il soupire. Comment est-ce qu'il pouvait changer ça? Ça fait des années qu'il vit comme ça. Ou qu'il survit plutôt. Il en a besoin presque autant qu'il a besoin d'air pour respirer. Sa vie est infernale sans, un flot de pensées désagréables en continu. « T'as dit que tu me demandais pas de changer de A à Z... » déclare-t-il en restant à distance d'une voix si faible qu'il est même pas sûr qu'elle l'ait entendu. L'effet euphorique retombe, Clyde se sent juste abattu. D'un pas décidé, il se dirige vers la valise d'Alma, la soulève. « Comme tu voudras. Si mademoiselle veut bien me suivre. » Clyde avait voulu faire dans la légèreté mais il avait trop de mal à cacher sa déception. Les intonations de sa voix l'avaient trahi, il était presque blessé. Il se sent un peu con finalement. Il ouvre la porte de sa chambre. Rien de fameux. Un lit double, une armoire, quelques fringues au sol. Le strict minimum niveau confort, Clyde n'a jamais aspiré au grand luxe. Il pose la valise d'Alma dans un coin, faut dire que la pièce n'est pas bien grande non plus. La lumière est éteinte, Alma et Clyde ne sont éclairés que par la lumière extérieur filtrée par la seule fenêtre de la pièce. « Bon bah... Je te laisse alors. » Mais Clyde reste droit comme la justice dans la pièce, ne parvint pas à se bouger jusqu'à la sortie. Il regarde Alma, cherche à apercevoir un sourire, quelque chose qui lui ferait croire qu'il n'avait pas fait le mauvais choix lui non plus. Quelque chose d'un minimum encourageant, un signe de la main, n'importe quoi.

Changement d'atmosphère. Les rires et blagues de tout à l'heure sont bien loin. C'est toujours comme ça, entre eux, le ying et le yang, le feu et la glace, deux aimants qui s'attirent pour se rejeter l'instant d'après. Une micro-bataille qui devient presque fatigante. Du moins, pour Alma. Clyde, lui, il a l'habitude de ce genre de relation avec autrui. Plus il les repousse, mieux c'est. Mais la brune n'aime pas ça, elle déteste même ce genre de lien. Elle frotte ses deux mains l'une contre l'autre afin d'enlever cette conne de poudre. « T'as dit que tu me demandais pas de changer de A à Z... » lance-t-il, loin d'elle. Elle secoue la tête par la négative, roulant des yeux. Elle a l'impression d'être dans un cercle vicieux. « c'est pas ce que je te demande Clyde. je veux juste que tu prennes conscience de ta paternité et que tu te conduises en conséquence. » dit-elle. Elle passe sa main sur son visage, lâche un profond soupir de désespoir. « j'sais pas si tu te rends bien compte, mais dans quelques mois, il y aura un petit garçon qui réclamera de l'attention. si jamais j'suis sur le point d'accoucher, j'attends que tu décuves et j'accouche sur le tapis, c'est ça ? » s'exclame-t-elle. Non, il ne comprend pas. Maintenant que sa mère l'a mise à la porte, il est la seule personne sur qui elle peut compter. Mais apparemment elle s'est trompé. Le pire, c'est qu'elle n'a même pas envie de se disputer avec lui. Cela ne mènerait à rien. Il attrape sa valise, se dirige vers la chambre. Elle le suit, sans rien dire. Elle n'a pas envie de batailler. Pas ce soir, bien trop lasse de se battre avec les gens. Elle inspecte un instant la chambre. Du linge par terre, le strict minimum, elle ne l'imaginait pas autrement. Elle s'assoit sur son lit, restant muette comme une tombe. Elle attends un moment, puis s'allonge sur celui-ci, dos à Clyde.  « Bon bah... Je te laisse alors. » dit-il. Elle ferme les yeux, sent sa gorge se serrer. Elle rouvre ses paupières, ses yeux sont embuées de larmes. Elle ne les retient pas, se contente de rester stoïque. Du moins quelques instants. « j'suis fatiguée. j'suis fatiguée d'essayer de te faire comprendre les choses, fatiguée de me battre, fatiguée d'oser espérer construire un avenir à mon fils... alors j'arrête. » lance-t-elle, d'une voix faiblarde. Un vrai calvaire cette journée. « j'm'en irais demain matin. avoir ce bébé à deux n'est définitivement pas une bonne idée. » finit-elle par dire, fixant le mur en face d'elle. Ô oui, sa réaction peut paraître disproportionnée. Mais elle n'a plus la force de quoique ce soit, aujourd'hui.

Il attend. L'attente lui parait durer des heures. C'est interminable et il se sent malade. Il finit par désespérer, se dire qu'elle ne lui donnera pas ce qu'il veut. Pas ce soir. Peut-être même jamais. Ça finit par tomber, Clyde a comme du mal à respirer. Il secoue la tête, c'est horrible. Alors qu'il avait enfin décider de faire quelque chose de sa vie, Alma anéantit tout ce qu'il s'était imaginé ses dernières semaines. Certes, il avait pas pensé que ce serait parfait mais il l'avait suffisamment voulu pour se sentir terrassé par la nouvelle. Il regarde Alma. Son dos plutôt. Il la déteste. Il a envie de lui dire. Il le fait pas. Il sait très bien que c'est faux. Malgré toutes les horreurs qu'elle peut penser de lui, Clyde avait toujours fait une place particulière dans sa vie à Alma. La preuve. Elle était dans son lit. Seule. Il n'avait même pas pensé à la rejoindre. Enfin, si, plus tôt dans la soirée peut-être qu'il aurait tenté quelque chose... Mais là? Il était carrément dégouté. « T'as raison. » Elle a tort mais Clyde, blessé, ne cherche pas à communiquer. Sans un mot, il quitte la chambre, ferme délicatement la porte derrière lui alors qu'il avait rêvé de la claquer. Il se retrouve dans son canapé devant son attirail de débauché. Il en était pas très sûr mais il en avait sûrement besoin là maintenant. Juste oublier. Retrouver ses attitudes de petit connard, celles qui lui avaient permis de pas morfler jusque-là. Se perdre le nez dans sa poudre, plus jamais se souvenir. D'une main tremblante, Clyde se prépare trois rails. Alors qu'il a à peine finit le deuxième, il s'arrête net. Sa tête lui fait mal, il devient cinglé. Sa conscience qui lui parle, quelque chose comme ça. Il grogne, se lève et ouvre la porte de sa chambre. Il reste là quelques secondes, la main sur la poignet, observant la pénombre de sa chambre. « T'as pas le droit. » Clyde fait un pas dans la chambre, ferme la porte. « Je peux tolérer que tu sois une peau de vache avec moi, je peux supporter tes ultimatums à la con mais toi, t'as pas le droit de me retirer ça. Tu peux pas me prendre et me jeter juste parce que je suis pas un putain de mec parfait! » Sa voix tremble, on dirait qu'il s'énerve. « Franchement Alma, qu'est-ce qu'il me reste à faire pour que tu comprennes? »

« T'as raison. » se contente-t-il de dire. 'T'as raison'. Trois pauvres mots pour tenter de parlementer. Elle croyait qu'il allait se battre, argumenter pour lui prouver qu'il veut vraiment faire partie de la vie de son enfant. Mais rien. Juste un 't'as raison'. Rien de plus. Elle le sent s'éloigner, la porte se claque. Elle est là, comme une sacré conne, dans le noir, allongé dans un lit qui n'est même pas le sien, le coeur au bord du précipice. Alma ne bouge pas d'un pouce, elle pleure, des litres et des litres, comme une connasse de gamine qui vient de se faire larguer par son connard de copain alors qu'elle pensait qu'il était l'homme de sa vie. Mais là, il y a beaucoup plus en jeu. C'est pas les peines de coeur d'une mioche en jeu, c'est la vie d'un être humain et les répercussion sur l'avenir. Elle reste comme ça, une minute, peut-être deux, voir carrément une heure. Un coup sur la porte, un halo qui se fait de plus en plus grand.  « T'as pas le droit. » entend-elle. Bien sûr, qu'elle a le droit. « Je peux tolérer que tu sois une peau de vache avec moi, je peux supporter tes ultimatums à la con mais toi, t'as pas le droit de me retirer ça. Tu peux pas me prendre et me jeter juste parce que je suis pas un putain de mec parfait! » s'exclame-t-il. Elle prend chaque mot tel un coup de poignard dans le ventre. « Franchement Alma, qu'est-ce qu'il me reste à faire pour que tu comprennes? » demande-t-il. Elle fronce les sourcils, se relève derechef, allume la lumière, se met à sa hauteur. « moi moi moi... t'es vraiment qu'un putain d'égoïste Clyde. » dit-elle, le scrutant longuement. « Regarde-toi. T'as les yeux révulsés, le nez encore pleins de poudre. je ne te demande pas d'être un père parfait, d'être juste un père tout court. et parti comme tu es, tu n'en seras jamais un. » lance-t-elle. Elle respire pour ne pas péter littéralement un plomb. « tu t'entends parler ? te retirer ? oh bon sang Clyde, mais tu ne veux pas de ce bébé, tu veux juste le titre en lui-même pour te racheter une conduite, prouvez à tout le monde que t'es finalement pas un connard. Cette famille, tu t'en fou. tu t'en fous de lui, tu t'en fous de moi. Je... j'comptais sur toi, moi, j'pensais avoir fais le bon choix. » finit-elle par dire, levant les yeux au ciel, afin de retenir les larmes qu'elle a déjà fait beaucoup trop coulées. Elle baisse les yeux. « j'la voulais, moi, cette famille. toi, mini-toi, et moi... j'voulais que tu te battes pour me prouver que ça en valait le coup, que tu me montres que toi aussi, tu serais heureux de voir ce p'tit homme courir partout, même si c'était loin d'être prévue... mais tu préfères te laisser couler dans cette merde en te persuadant qu'elle t'aiderait à aller bien.» finit-elle par dire.

Clyde regarde sa main, prête à s'abattre sur la face d'Alma. Il est tellement blessé qu'il finit par en être en colère. Hors de lui. Mais il peut pas la taper. Enfin, physiquement, il pourrait. Elle est là, juste devant lui, presque à sa merci. Sauf qu'il ne peut pas s'y résoudre. Il y a cette petite voix dans sa tête qui lui dit de ne pas le faire... C'est Alma. Il serre le poing, se dissuade de faire quelque chose d'aussi débile. Il la reverrait plus jamais. C'est pas ce qu'il voulait. Non seulement, il voulait la revoir mais en plus il comptait bien voir son petit garçon aussi. Il soupire, essaye de se calmer sans vraiment y parvenir. « C'est ce que tu crois? Vraiment? Je m'en fous de vous? » Clyde ouvre les bras comme pour lui montrer la situation, l'absurdité d'une telle affirmation. Et elle est encore gentille en balançant ça, c'est que le début. Clyde se décompose. La fameuse morale, le "tu serai mieux sans ça". Clyde ricane et, les joues rouges, il s'éclipse dans le salon. Non, il ne fuit pas. Il rassemble ses affaires. Whisky, cocaïne... Même ses feuilles. Il retourne ensuite dans sa chambre, ouvre la fenêtre et jette le tout avec rage. Ça lui fait mal, il voit l'argent s'envoler mais tant pis. Si c'est ce qu'il faut, si c'est ce qu'elle a envie de voir. Une fois fait, il se penche sur le rebord de la fenêtre, s'assure qu'il n'y avait personne en dessous. Il voulait pas un blessé sur la conscience non plus. Finalement, l'air frais lui fait du bien et il reste comme ça plusieurs secondes. Il a enfoui son visage dans ses mains, n'arrive pas vraiment à trouver le courage de faire à nouveau face à Alma. Il a envie de chialer comme un gosse autant que de mettre son poing dans la figure de quelqu'un. Il arrive même pas à y croire, il venait de tout jeter dehors alors qu'il en avait tellement besoin... Mais elle comprend pas Alma, elle peut pas. Clyde fuit tellement de choses dans sa vie... Mais pas ça. Non, il refuse qu'on lui dise qu'il fuit sa paternité. Il l'a peut-être fait dans le passé, néanmoins, il était là maintenant. Prêt à l'aider, à arrondir les angles, à faire au mieux quoi. Au final, peut-être qu'il avait aussi besoin d'aide. « Tu veux que je me batte Alma? D'accord. » Il se retourne, ferme la fenêtre et s'y adosse. Il garde les yeux un moment rivés sur le sol avant de les lever vers elle. « Seulement, je compte pas me battre avec toi. » Il repense à son moment de folie, ce geste démesuré. Il regrette un peu. Et puis c'est peut-être mieux. Alma doit avoir raison, un père n'est pas sensé se droguer à la moindre contrariété. Fallait que Clyde apprenne à vivre autrement et ça, ça lui faisait peur.

La colère. Voilà ce qu'elle voit dans ses yeux. La même que lorsqu'il a apprit qu'elle était enceinte, la même que lorsqu'il lui a demandé d'avorter et qu'elle a refusé. Configuration différente, elle amène cependant au même résultat. Un Clyde hors de lui qui ne contrôle pas ce qu'il fait. Est-ce la faute d'Alma s'il entre dans une rage telle ? C'est fort probable. Elle en est même carrément persuadée. Alors pourquoi se faire du mal comme ça ? « C'est ce que tu crois? Vraiment? Je m'en fous de vous? » dit-il, secouant ses bras. Elle lâche un énième soupir. Leur discussion ne rime à rien. Du moins, elle m'amènera nulle part. Elle le sait. Il le sait. Pourtant, ils s'engouffrent tout les deux dans une brèche sans fin. « c'est ce que tu montres à la face du monde. et c'est ce que ressens. répond-elle, levant les yeux vers lui. je suis sûre qu'aucune personne de ton entourage ne sait que tu vas avoir un petit garçon. ni même juste un bébé. tout ça pour garder ta petite réputation intacte. » continue-t-elle, secouant la tête. Pas besoin de réponse, elle sait que c'est la simple vérité. Il n'aura jamais le cran d'annoncer cela à ses soit-disant potes. Sans doute parce qu'il a trop honte. Sans doute parce qu'il a trop peur. Un léger rire se dégage entre ses dents et il prend la poudre d'escampette, encore une fois. Une minute pas, peut-être deux. Elle s'est presque résignée à se recoucher. Mais il revient, les mains pleins de ces cochonneries qui coulent quotidiennement dans son sang. Son paradis artificielle, sa porte de sortie, tenant entre ses bras. Il s'élance vers la fenêtre, ouvre cette dernière, balance ses précieux trésors avec perte et fracas. Alma sursaute devant ses gestes brusques, ne s'attendait pas à quelque chose d'aussi radicale. Mais pourtant il l'a bien fait. Même si c'est sur un coup de tête, il l'a fait. Un silence tombe, Alma n'ose pas bouger. Penaude ou désemparée, honteuse ou énervée. Elle est arrivée à un stade où elle ne sait même pas ce qu'elle pense ni ce qu'elle ressent. Elle s'assoit sur le lit, regarde ses mains. Elle ne veut pas croiser le regard de Clyde, elle sait pertinemment qu'elle a été trop loin et se sent conne. Ouais, complètement conne, même si le geste que vient de faire le jeune homme la profondément toucher. « Tu veux que je me batte Alma? D'accord. » lance-t-il. Ses prunelles se baladent jusqu'à lui, sans piper mot. « Seulement, je compte pas me battre avec toi. » ajoute-t-elle. Sur son visage se dessine une moue presque désolée. Malgré elle, elle le pousse dans ses derniers retranchements, et ce n'est pas l'effet recherché. « ce n'est pas ce que je veux non plus. c'est même très loin d'être le cas. t'es la seule personne qui me reste avec qui je peux partager ça... » lâche-t-elle, ses mains se posant sur son ventre.

Clyde en mène pas large. Il est perdu entre ses émotions, entre colère et désespoir. La tristesse aussi, Clyde est blessé. Il pensait qu'il avait réussi à faire ressortir autre chose de lui. Pas aux yeux des autres, évidemment. Rien que pour Alma. Il avait eu l'impression qu'elle avait posé un regard neuf sur lui. Et puis non. A cela vient s'ajouter sa toxicomanie, le fait qu'il est encore bien attaqué par ce qu'il s'est fait subir auparavant. Ça aide pas vraiment, Clyde se sent en pleine descente. Alma a raison, il n'est pas allé crier sur tous les toits qu'il allait devenir père. C'est pas parce qu'il s'en fout, c'est qu'il a personne à qui se confier. A part Axel. Et Alex. Il leur avait dit à eux. Il leur faisait confiance. Du coup, il préfère pas répondre. Pas tout de suite. Il avale la pilule d'abord. « Je dois faire un communiqué de presse tu crois? Tu débloques. » Et à la minute même où il prononce ces mots, Clyde regrette. Il aurait mieux fait de se taire. Cette discussion a pas de sens. Ni Alma, ni Clyde ne savent précisément de quoi ils parlent. Il soupire, se frotte les yeux. Il est fatigué, épuisé par tout ce remue-ménage. Leurs regards se croisent, Clyde constate le changement d'état d'Alma. Ça part dans tous les sens, il commence vraiment à avoir du mal à comprendre. Clyde se mord la lèvre inférieure quand Alma lui répond, elle est juste perdue en fait. Comme lui. Il ferme les yeux, se laisse tomber sur son lit auprès d'Alma. « Tu sais ce que je pense? T'es fatiguée. T'as passé une journée pourrie. T'as besoin de te reposer. » Elle était pas la seule pour le coup, Clyde serait pas contre un peu de répit aussi. « Tu réfléchiras mieux à tout ça demain. Moi aussi d'ailleurs. » Clyde était presque paternaliste, un petit chef de famille. C'est un rôle qu'il a déjà occupé avant de se barrer de chez lui alors qu'il était plus jeune encore qu'Alma. C'est plutôt naturel de ce fait. Faut croire que ça s'oublie pas. « Tu penses réussir à t'endormir? On peut... Je sais pas moi, regarder la télé? Ou je peux te chanter une berceuse. J'en connais pas mais bon. » Il sourit doucement, se redresse de manière à être assis à côté d'Alma. Il la regarde, attend une réponse. Pourvu qu'elle se mette pas à nouveau à criser alors qu'il lui propose une trêve. Cette fois, Clyde est pas sûr de savoir réagir avec diplomatie.

Dans le fond Alma, ce qu'elle voulait, c'est que son fils arrive dans ce monde de fou avec un minimum de repères. Un père, une mère, rien de plus. Pas forcément heureux ensemble. Même heureux chacun de leur côté, cela lui suffirait amplement. Juste des parents présents pour son enfant, rien de plus. Au lieu de cela, elle a l'impression d'assister à la troisième guerre mondiale, avec des mines explosant de partout. Pas une goutte de sang, mais deux âmes fortement ébranlées. Deux parties qui campent sur leur position et qui défendent bec et ongles leur idée. Mais en y réfléchissant bien, ils ont tout les deux raisons. Clyde est présent et a fait des efforts depuis le début de la grossesse d'Alma. Elle ne dirait qu'il est devenue un agneau, oh non. Plutôt un chat sauvage qu'elle aurait réussi à apprivoiser. Mais chassez le naturel, il revient au galop. Malgré toute la bonne volonté qu'il met à être sérieux, son goût pour les substances illicites remet sérieusement son statut de père en doute.« Je dois faire un communiqué de presse tu crois? Tu débloques. » dit-il. Réplique typique de Wright. Cela n'étonne même pas la jeune femme. Dès qu'on touchait un point sensible, ou même un point qui l'énerve tout court, il lâche un pique, envoie boulet son interlocuteur. Alma lâche un rire, nerveux. Ou ironique. Elle ne sait pas vraiment, mais ce n'est pas très bon présage. « tu sais quoi ? laisse tomber, il vaut mieux que personne ne soit au courant finalement. » réplique-t-elle. C'est stupide, Alma ne pense même pas ce qu'elle dit. Il s'agit seulement d'une défense pour montrer qu'elle n'est pas affectée par cela. Elle pensait qu'il y avait un lien, entre eux. Un lien plutôt fort, dont les stigmates se trouvent au creux de son ventre. Mais apparemment, elle s'est trompé, encore une fois. Elle est fatiguée. Fatiguée de tout. Elle se bat avec sa conscience pour ne pas courir chez Swen et lui demander asile. Et puis Clyde glisse jusqu'à elle. Finalement, pas de gagnant, ce soir. « Tu sais ce que je pense? T'es fatiguée. T'as passé une journée pourrie. T'as besoin de te reposer. Tu réfléchiras mieux à tout ça demain. Moi aussi d'ailleurs. » affirme-t-il. Elle acquiesce. Pour la première fois, ce soir, elle est d'accord avec ses dires. « Tu penses réussir à t'endormir? On peut... Je sais pas moi, regarder la télé? Ou je peux te chanter une berceuse. J'en connais pas mais bon. » renchérit-il. Alma lâche un timide rire. Un silence tombe, ses prunelles croisent les siennes. Elle se pince les lèvres. « Pas besoin de tout cela. J'veux juste que tu restes avec moi, cette nuit. J'en ais vraiment besoin. Vraiment vraiment besoin. » finit-elle par avouer, haussant les épaules.

Clyde lève les yeux au ciel et cette fois, il se retient de répondre. Ce serait mettre de l'huile sur le feu et c'est nullement nécessaire. Ils se faisaient assez de mal comme ça. C'est complètement fou, ça en devient presque ridicule. Ils s'entretuent. C'est pas pour rien qu'il avait toujours fuit ses proches. Ça finissait toujours comme ça... Il était cruellement décevant, on lui en mettait plein la gueule et comme il était incapable de se remettre en question, il se barrait. C'est un poil différent cette fois... Clyde est encore là. Il encaisse encore ce que lui dit Alma, n'a pas encore pris ses jambes à son cou. C'est même lui qui dépose les armes. Clyde est soulagé d'apprendre qu'Alma approuve, il soupire. Il sent la tension s'évacuer et a l'impression de respirer un peu mieux. Il fronce finalement les sourcils à la demande d'Alma. Il avait pas l'impression d'être très qualifié pour ça. Veiller sur elle, c'est une chose, servir de doudou en est une autre. Il hésite. C'est rien pourtant, c'est qu'une nuit. Alma demande sûrement qu'un peu de compagnie. Alors Clyde hoche doucement la tête, se lève pour se débarrasser de son pantalon et de son haut. Pas de brossage de dents ce soir, Clyde a plus qu'une envie : s'écrouler dans son lit. Ce qu'il fait. Il se glisse jusqu'à sa place habituelle, s'installe sous les draps. Il attend qu'Alma fasse de même, inspecte son -pas si- petit corps de femme enceinte. Il sourit, un peu comme un con. « Quatre mois hein? Waw... Je crois que je vais devoir te trouver une chaise roulante pour le reste de la grossesse! » Clyde rigole. C'est vrai qu'il a du mal à s'imaginer Alma plus ronde que ça encore. Et pourtant. Cinq mois devaient encore s'écouler avant que leur petit garçon ne naisse. Il allait assister à une sacrée transformation physique. Il est pas mécontent faut dire. Clyde est presque fier en regardant Alma évoluer. C'est lui, c'est eux. Et même si ça bouleverse son petit monde et ses petites habitudes, Clyde est content. Il a souvent peur, certes. Mais tellement hâte également. Il crève d'envie de voir à quoi il ressemblera. Son portrait craché? Celui d'Alma? A moins que ce soit un mélange, un beau condensé de ce que Clyde et Alma sont à eux deux.

Clyde secoue la tête, elle se sent presque soulagée. Cette journée, elle signe le début de son indépendance. Sa mère lui a coupé ses ailes de petite fille en même temps que de lui couper les vivres. Un véritable supplice. Alors oui, Alma est contente que Clyde accepte de dormir à ses côtés. Elle est à des années lumières des conquêtes du brun, et ne compte aucunement lui faire du charme pour arriver à un quelconque résultat. Elle veut juste ne pas finir la journée seule. Elle le suit du regard, il enlève son t-shirt. Elle scrute longuement son torse. Cela serait mentir que de dire que Clyde n'était pas un bel homme. Encore plus de dire que si ce fameux soir elle avait couché avec lui, c'était uniquement parce qu'elle était désespérée. Il est beau. Affreusement beau. Elle finit par se lever, par retirer son jean, puis son t-shirt pour en enfiler un plus confortable qui se trouve dans sa valise. « Quatre mois hein? Waw... Je crois que je vais devoir te trouver une chaise roulante pour le reste de la grossesse!» plaisante-t-il. Elle lui fait face, arque un sourcil. Elle sait qu'elle va avoir le droit à ce genre de blague tout au long de sa grossesse. Et puis, elle trouve ça magnifique Alma, ses petits kilos en trop. Ils contiennent la vie. « une brouette serait beaucoup plus drôle.» rétorque-t-elle, avant de s'allonger à ses côtés. Elle fixe un moment le plafond, passe sa main sur son ventre. Ca fait bizarre, de dormir ici, dans le lit de Clyde. En fin de compte, elle ne connait rien de lui. Entrer dans sa garçonnière lui donne l'impression d'entrer un peu dans sa tête. Enfin, un peu. Le calme plat, qu'elle décide de rompre. « notre petit garçon va pouvoir dormir avec ses deux parents.» lance-t-elle, tournant la tête vers lui. Okay, réplique carrément stupide. Mais véridique. C'est leur première nuit, tout les trois, et ils ont failli s'entretuer. Quel beau tableau de famille. Elle soupire d'aise. Cela lui fait un bien fou d'être au calme, sans conflit, avec qui que ce soit.

Alma se déshabille, Clyde n'en perd pas une miette. C'est pas vraiment par perversité... Bien qu'il le soit, pervers. C'est surtout de la curiosité. Il découvre. Il avait déjà vu ce corps avant mais il était bien forcé de constater qu'il avait bien changé depuis. Petit sourire en coin. C'est mignon. Harmonieux. Alma ressemble à un vrai zombie avec le reste de maquillage sur ses joues mais aux yeux de Clyde, à ce moment-là, elle est tout simplement ravissante. Rayonnante. « Plus drôle, sûrement. Moins pratique surtout! » Il sourit, elle s'allonge près de lui. C'est bizarre. On peut pas dire que ce soit arrivé souvent à Clyde d'héberger une fille dans son lit. Jamais en fait. Enfin, pas sans contrepartie. Sexuelle de préférence. Là, il était sage. Peut-être parce que le mal était déjà fait... Surtout parce qu'il avait appris à respecter Alma. Une niaiserie qui fait encore une fois sourire Clyde, attendri. Alma a ce bonhomme dans le ventre tout le temps, Clyde est pas étonné qu'elle ait l'impression qu'il soit "là". C'est pas vraiment le cas de Clyde qui réalisera tout ça beaucoup mieux le jour de l'accouchement. En attendant, il ramène Alma à lui, passe ses bras autour de son ventre. Il ferme les yeux, cherche même pas à comprendre ce qu'il fait et se laisse totalement aller. « Dors » murmure faiblement Clyde avant de tomber dans les bras de Morphée. Il a dormi ensuite comme un vrai bébé. D'ailleurs il continue de le faire bien qu'il fasse jour depuis un moment déjà. Ça semble pas le déranger. Faut dire que la nuit avait été mouvementé. Ça n'arrive pas souvent à Clyde de dormir aussi bien, il lui fallait pas beaucoup pour perturber son sommeil de manière générale. Un bruit dans la rue, un mauvais rêve et voilà l'insomnie!

Les bras de Clyde l'attire vers lui puis se pose sur sa taille, épousant les courbes de son ventre arrondi. Alma réprime un frisson. C'est tellement spécial venant de lui, tellement loin de son image. Elle se sent presque privilégiée de pouvoir voir cette nouvelle facette de sa personnalité, bien loin de l'homme brute de décoffrage qu'il veut bien montrer. Le Clyde qu'elle aimerait voir tout les jours, bien qu'il y ait peu de chances pour que cela arrive. Alors elle préfère savourer ces moments, sans penser à sa prochaine saute d'humeur. « Dors. » dit-il en un murmure. Un sourire étire ses lèvres et elle pose ses mains sur les siennes. Une façon d'être liés, tout les trois. Ses paupières papillonnent, le rythme des battements diminuent avant de se fermer complètement, laissant le stress de cette journée loin derrière elle. Lorsque celles-ci décident de s'ouvrir, la chambre avait retrouvé toute sa clarté habituelle. Les yeux mi-clos, Alma voit les vaisseaux lumineux traverser la pièce. Elle devine alors que le jour a déjà pointé le bout de son nez. Petit à petit, sa vision devint net. Elle fronce les sourcils, épie l'espace d'un instant la pièce. Ses prunelles dansent de la porte au plafond, du plafond au lit. Les deux bras de Clyde n'ont pas bougé d'un pouce et sont toujours collés contre son ventre. Elle tourne la tête, il dort encore. Pas étonnant après tout ce remue-ménage de la veille. Elle se mort la lèvre, retire le drap qui recouvre son corps. Par la suite, elle attrape les mains de Clyde puis les repose le plus délicatement possible contre le matelas. Ca serait tellement dommage de le réveiller alors qu'il dort comme un bébé, ce qui ne doit pas arriver bien souvent. La brune se retourne une dernière fois pour l'observer, avant d'empoigner sa valise, ramasser ses affaires et se rendre dans le salon. Elle remet son pantalon, ne prend même pas la peine de changer de t-shirt. Elle veut juste partir, ne pas déranger Clyde plus longtemps. Elle a vu les dégâts qu'elle a pu causer en quelques heures, inutile d'en rajouter. Alma cherche ses chaussures, sans pouvoir mettre la main dessus. Elle virevolte, doucement, sa quête n'aboutissant à rien.

Clyde a toujours eu du coeur. Néanmoins, y'a pas grand monde qui peut se vanter de le savoir. Pas même Clyde. Il a passé tellement de temps à causer du tort aux autres qu'il a du mal à voir les moments où il a été irréprochable. Il multiplie les erreurs et la plupart du temps, il s'en contrefout. Pas quand il s'agit de son enfant. Si l'idée d'être père lui donnait la nausée il y a encore quelques temps, Clyde est plus que jamais décidé à accueillir ce petit garçon sur Terre. Chez lui. Dans sa vie. Et dans celle d'Alma aussi, bien qu'il faille reconnaitre que ce sont encore deux compartiments bien distincts. Oh bien sûr, ils arrivent à être connectés par moments. Ça dure jamais longtemps, ça tourne toujours mal. Pas étonnant qu'Alma veuille partir. Clyde ne remarque pas tout de suite son absence dans le lit. Il met quelques minutes à peine à sentir le vide à côté de lui. Il ouvre difficilement les yeux, est aveuglé par la lumière. Il tient bon, les garde ouverts. Il jette un regard à travers la pièce sans être capable de trouver Alma. Elle n'est pas là. Elle est peut-être déjà partie. Ou pas. Clyde entend des bruits venir du salon. Il décide de se lever non sans difficulté. Il sort de la pièce, voit qu'Alma cherche quelque chose. A peine réveillé et pourtant, Clyde ne met pas longtemps à comprendre. « Je les ai caché » déclare-t-il sur un ton sérieux. C'est faux. Par contre, il n'a pas envie qu'elle parte. C'est viscéral. Il veut pas qu'elle aille chez son frère. Ou chez n'importe qui d'autre en fait. C'est leur histoire à eux deux, ça n'appartient à personne d'autre. C'est pas que de l'égoïsme. Clyde a envie de partager cette grossesse avec Alma. Qu'en avait-il vu au final à part ce petit ventre caractéristique? Rien. Il en savait rien et il était peut-être temps qu'il arrête de se mettre à l'écart de tout ça. C'est bien ce qu'il est sensé faire en tant que père, non? Il soupire, passe une main dans ses cheveux en bataille avant de s'étirer. Sympa comme nuit au final, il avait bien dormi pour une fois. Il va dans la cuisine qui donne sur le salon, se sert un verre d'eau. « Tu veux boire quelque chose? Manger? » demande-t-il comme si de rien n'était, comme s'il ne venait pas de la voir tenter de filer en douce. Il aurait pu lui dire tout simplement qu'il voulait qu'elle reste, faut croire qu'il en avait pas le cran. C'était plus simple d'y arriver par ce biais.

Son regard survole le sol, mais impossible de mettre la main sur ses putains de chaussures. Elle soupire, balance un juron. Elle se presse, ne veut pas s'attarder ici. Ce n'est pas la faute de Clyde, oh non, bien au contraire. Il met tout en œuvre pour que tout se passe bien. Il fait des concessions, prend énormément sur lui. Non, ça va d'elle, c'est certains. Finalement, elle ne sait pas si elle se sent prête à vivre tout ces bouleversements, du haut de ses dix-huit printemps. Elle a peur que ses émotions ne la submergent, ce qui pourrait la pousser à fauter, sur tout et n'importe quoi. Elle préfère donc quitter l'appartement, avant de pousser Clyde à bout. Ou pire, le décevoir. Elle veut vraiment qu'il fasse partie de la vie de son fils, et dans la sienne aussi. Mais de là à gérer tout ce bordel quotidiennement, pas sûr qu'elle en soit capable. Des bruits de pas se font entendre derrière elle, Alma se retourne. Il est là. « Je les ai caché. » dit-il. Son visage est plutôt fermé. Sur le coup, elle se sent con. Très con même. Son regard fuit, essaye de trouver un point où se poser. Ca doit sans doute le blesser, Clyde, qu'Alma n'arrive pas à lui faire entièrement confiance. Ou alors il s'en fou. « bien joué, elles sont introuvables. » déclare-t-elle, fourrant ses mains dans les poches arrières de son jean. Elle reste plantée là, ne sachant pas trop quoi faire. Elle n'est pas idiote, elle sait très bien qu'il y a une autre paire de chaussures dans sa valise. La vrai question est plutôt doit-elle enfiler celles-ci et prendre les jambes à son cou ? « Tu veux boire quelque chose? Manger? » demande le jeune homme. Elle lâche un nouveau soupir. Elle reste silencieuse, pour le moment. Clyde se voile la face, ce qui agace légèrement Alma. Elle s'avance, va ouvrir la fenêtre. L'appel d'air lui fait un bien fou. Elle reste là, regardant le paysage. « pourquoi tu fuis la réalité Clyde ? tu sais très bien que si je reste ici, ça ne fonctionnera pas. » affirme-t-elle, lui faisant dos. Il a sa vie, elle a sa vie, vies qui sont diamétralement opposées. Les faire concorder est mission impossible.

Clyde lance un sourire ironique à Alma mais reste silencieux. Il n'a rien à dire. Rien de positif en tout cas. Il est plutôt irrité. Déçu peut-être. Blessé. Il détourne le regard, ouvre le frigo à la recherche de quelque chose de comestible. Il a pas faim pourtant. Il a envie de se réveiller avec un bon petit joint mais c'est pas vraiment possible. Il a tout jeté hier soir par la fenêtre et en plus Alma est là. Le bébé aussi du coup. Il soupire et se sort un yaourt auquel il n'a même pas envie de toucher. Il reste là, sur le plan de travail, à se foutre de la gueule de Clyde qui se sent pathétique à en mourir. Clyde ne pipe pas mot quand Alma va ouvrir la fenêtre, il reste loin, la regarde faire. Il hausse finalement les épaules. Il a toujours fait ça, fuir la réalité. C'est pas ce qu'il a l'impression de faire à ce moment-là pourtant. Il est pas d'accord, ne voit même pas de quoi elle parle. Ça pourrait marcher. Quand il le projète dans son imaginaire, ça marche. « Et qu'est-ce qui va fonctionner si tu pars? » Clyde essaye de ne pas être trop sec. Il applique une certaine distance entre ses propos et lui, essaye de s'en détacher pour ne pas montrer à quel point la situation l'affecte. Comportement classique chez lui. Finalement, il le mange ce yaourt. Ça passera peut-être. Il faut que ça passe. Il y a des trucs que Clyde doit arrêter de faire. Bien sûr, il promet pas de s'arrêter du jour au lendemain. Ce serait suicidaire. Il va juste se calmer. Un peu. Ça se fera tout seul. Enfin, il espère. Clyde est peut-être un peu trop fier pour passer par la case cure de désintox, il va se battre seul. Parait qu'il faut de la volonté, une motivation. Ça tombe bien, Clyde sait exactement pourquoi il serait capable de faire une telle chose. Pour qui plutôt. « Franchement Alma... Si c'était pas moi le problème pour une fois? » Il croise les bras sur son torse qu'il n'avait pas pris la peine d'habiller à la sortie du lit. En fait, il était en train d'avoir une conversation capitale en caleçon. Comme quoi, Clyde fait toujours les choses bien.

Le frigo s'ouvre. Elle a le sentiment que Clyde ne prend même pas la peine de l'écouter, qu'il prend cette situation beaucoup trop à la légère. Et c'est bien cela qui lui tape sur le système. « Et qu'est-ce qui va fonctionner si tu pars? » qu'il demande, déviant sa réponse. Elle se tourne et le regarde. Il est là, en train de manger, l'air de rien. Impassible. Comment fait-il pour ne pas montrer une quelconque émotion ? Ne pas se laisser submerger comme elle le fait ? Ah oui, c'est vrai. Il a les neurones grillés, c'est pour ça. Alma croise les bras au dessus de son ventre. « Notre relation sera moins chaotique. » répond-elle seulement. Chaotique, c'est le mot. Un joli petit bordel. Ils passent des cris aux rires, des rires aux cris en un claquement de doigts. Alors vivre ça sept jours sur sept paraît être un réel défi. Elle n'aura certainement pas la force de se battre avec lui. Clyde s'énerve, elle le sent au son de sa voix. Ce n'est pas le but. Elle veut juste le laisser tranquille, hier était suffisant. Avec le recul, elle s'est rendu compte qu'elle s'était conduite comme une petite égoïste. Elle n'a pas le droit de lui interdire quoique ce soit. Il est adulte, il fait ce qu'il veut. « Franchement Alma... Si c'était pas moi le problème pour une fois? » balance-t-il. Elle ne peut s'empêcher de le détailler de haut en bas. Elle ne sait pas si ce sont les hormones qui parlent pour elle, mais il est terriblement sexy, là, ce matin, avec ses cheveux ébouriffés et son petit caleçon. Bref, là n'est pas la question. Sa remarque lui fit un pincement au cœur. Mais le pire, c'est qu'il a raison. Ouais, c'est de sa faute. « non, c'est moi. je... cette histoire prend des proportions qui me font peur. j'deviens comme toi, finalement. quand j'ressens quelque chose de trop fort, j'prend la fuite, alors... j'préfère m'en aller. » finit-elle par dire, avant de passer devant lui pour prendre sa paire de chaussures et les enfiler. Elle la referme, l'empoigne à nouveau. Elle s'approche de lui, dépose un baiser sur sa joue. « merci, de ne pas me laisser seule. » finit-t-elle par dire.